Pouvez-vous nous parler de votre parcours professionnel ?
Après l’Essec, j’ai exercé des fonctions de chef de produit puis de direction dans le domaine du marketing et du commercial en France et à l’étranger dans de grandes sociétés : Kraft Food, RJ Reynolds, Camel Trophy Adventure Wear, Allied Domecq (marques Ballantines, Mumm, Malibu) et enfin Rolex France.
En 2011, j'ai quitté Rolex pour devenir indépendant. Après avoir étudié plusieurs pistes, j'ai décidé de suivre la formation CRA à la reprise en février 2012. Cette formation m’a apporté une méthodologie pour effectuer une reprise : comment organiser mon travail et avec qui travailler en termes de partenaires. Sans cette formation, j’aurais été beaucoup moins efficace. Le groupe de repreneur CRA m'a par ailleurs permis d'échanger des informations, et aussi d’échanger tout court avec des personnes dans la même situation que moi.
Quel type d'entreprise cibliez-vous ?
Ayant toujours apprécié mon travail, j’ai traduit mon savoir-faire en une définition d’entreprise de création, fabrication et distribution de produits à destination des consommateurs. Cette définition est la première chose que j’ai faite dans ma recherche et elle a très peu varié par la suite. La notion de marque était importante pour moi.
Je suis parisien mais j’ai rapidement ouvert mes recherches à la province... et j’ai bien fait !
Comment s'est déroulée la phase de recherche d'entreprise à reprendre ?
J'ai commencé ma recherche en mars 2012, juste après ma formation CRA, et j’ai signé le closing le 22 novembre 2012.
J’ai suivi les conseils qui m'ont été donnés au cours de ma formation : il faut allumer des feux sur tous les canaux ! J’ai donc mis des alertes sur toutes les plateformes spécialisées : CRA, OSEO, CCI, etc. J’ai écrit ou envoyé des mails à tous les intermédiaires, aux banques et essayé d’avoir des rendez-vous.
C’est le cédant qui m’a contacté directement, après avoir remarqué ma fiche de cadrage sur une bourse d’annonce "repreneurs". Depuis quelques temps il regardait régulièrement les demandes.
Au total j’ai rencontré 5 cédants, étudié en profondeur 2 dossiers, y compris la société finalement achetée.
Le 2ème dossier était présenté par un intermédiaire, pour rentrer comme manager actionnaire avec un fond d’investissement. J’avais l’impression de revenir dans une multinationale...
La négociation a-t-elle été difficile ?
Non. Le cédant avait l’âge de la retraite et n’avait rencontré qu’un seul repreneur avant moi. Eu égard au personnel, il ne voulait céder qu’à un repreneur personne physique. Il m’a contacté très en avance par rapport à son départ en retraite.
J’ai fait connaissance de l’entreprise en avril/mai 2012 et la négociation sur le prix a duré environ 1 mois.
J’ai signé une lettre d'intention le 15 juillet, qui était déjà la concrétisation de notre accord et le closing a eu lieu le 22 novembre.
Quelle est l'activité de votre entreprise ?
La société Monnet crée, produit et distribue des chaussettes techniques pour le sport et l’outdoor. Nous sommes installés à Montceau les Mines en Bourgogne. Nous sommes 18 personnes (dont 13 à la production) plus 6 représentants multicartes.
La totalité de nos ventes provient de notre unité de production de Montceau les Mines. Notre CA 2012 est de 1.800 k€.
Le fait de fabriquer en Bourgogne nous permet d’avoir une réactivité en termes de développement très supérieure à une entreprise délocalisée. Dans notre métier l’effet de mode, de design et l’aspect technique sont très importants. C’est nous qui développons les modèles, quelquefois en commun avec une marque.
Nous distribuons nos produits auprès des chaines des sport (Le Vieux Campeur, Intersport , Sport 2000) et des spécialistes indépendants. Nous avons plus de 600 points de vente en France.
Nous sommes licenciés pour la marque Deneriaz (sous-vêtements, chaussettes, casques et masques de ski de compétition) et sommes distributeurs de la marque CEP (leader allemand des articles de compression) dans le réseau sport.
Avant de m’engager, j’ai fait parler les vendeurs des magasins. Cela m’a conforté dans mon choix. Le secteur est très concurrentiel. Il est dominé par 4 grands fabricants, dont Monnet et beaucoup de petits.
L’homme clef de la société, 48 ans, est responsable de la fabrication et du design. Il est très compétent dans ses fonctions et sa femme travaille également dans l’entreprise. J’ai pu discuter avec lui avant de signer le protocole.
Pouvez-vous nous parler du montage financier et juridique de cette reprise ?
La pertinence de mon business plan a fait que les 7 banques que j’ai contactées étaient partantes pour financer ma reprise.
Pour le banquier les éléments clés sont : l’entreprise, le repreneur et le business plan.
Le montage financier se répartit comme suit :
- apport personnel : 36%
- remontée de trésorerie : 10%
- OSEO (CDT) : 20%
- et 2 banques se partagent les 34% restant.
J’ai créé une holding de reprise ayant la forme d’une SAS. La société reprise est elle même une SAS
Vous avez eu recours à des professionnels pour vous aider ?
Oui et il me semble indispensable de faire appel à des spécialistes : au moins un expert-comptable et un avocat, tous les deux spécialisés en reprise d’entreprises. Ils apportent le recul, l’expérience, le conseil. Toutes choses que je n’avais absolument pas en commençant le processus de reprise.
Une reprise est un engagement entre 2 personnes, le cédant et le repreneur. Toute intervention extérieure vient "polluer" cette relation et risque de faire capoter la reprise. Les experts peuvent parler entre eux. Mais je conseille de toujours mener les négociations en tête à tête, quitte à ce que cela soit plus long car des sujets épineux peuvent être abordés. Mais ce qui compte c’est la qualité des échanges entre les 2 personnes clés.
J’ai été très bien accompagné par 2 experts recommandés par le CRA : Maitre David pour la partie juridique et M. Alexandre Tellier pour la partie audit et business plan. Ce dernier m’a aidé pour faire un très bon business plan qui m’a ouvert la porte de toutes les banques contactées.
Un conseil concernant le business plan ?
Le business plan est un exercice obligatoire pour forcer le repreneur à poser par écrit les grandes lignes de son projet et en même temps un outil pour vendre son projet aux bailleurs de fonds.
Il doit donc être prudent dans les chiffres et ambitieux dans les mots. Je conseille un business plan qui démontre que la banque est remboursée même avec une faible progression du CA.
Depuis la reprise Je suis concentré sur les moyens de faire progresser le CA et les profits, tout en gardant en tête les grandes lignes de mon business plan.
Quel a été le rôle du cédant après la reprise ?
Le cédant m’a contacté très en avance par rapport à la date de son départ en retraite qui était le 30 juin 2013, soit finalement 7 mois après la reprise. Nous avons organisé sans problème un accompagnement en conséquence. Cela se passe très bien, à l’image des négociations antérieures.
Comment se sont passés les 100 premiers jours de votre nouvelle activité ?
Dès mon arrivée dans l’entreprise j’ai eu des entretiens personnels avec chacun des salariés et des multicartes. Puis j’ai été visiter les clients avec les vendeurs.
L’urgence était le développement du chiffre d’affaires. Je me suis donc posé la question : qu’est-ce qui va apporter du CA ? Je me suis efforcé de tout mettre d’équerre, pour être parfaitement prêt pour les salons. L’entreprise vit les cycles de la mode. On présente la collection hiver en février et l’été en juillet.
Mon épouse travaillant à Paris nous avons gardé notre résidence principale en Ile de France. Montceau n’est qu’à 1h20 de la capitale en TGV. Je passe 2 ou 3 nuits par semaine sur place et le reste du temps je travaille depuis Paris. Mon cédant habitait Lyon et faisait de même.
Je n’ai eu aucune mauvaise surprise pendant les 100 premiers jours. La présentation de la société faite par le cédant était très réaliste et objective. La bonne surprise est la très haute qualité des employés de la société et surtout de ses cadres, ainsi que la très bonne ambiance de travail qui y règne.
Si c'était à refaire ?
Je le referai sans hésitation …… et plus tôt
J’éprouve un très grand plaisir à travailler tous les jours.
Je crois qu’il vaut mieux travailler avec plaisir 12 heures par jour qu’une demi-heure dans un mauvais environnement.
Avril 2013