Etape clé d’une création d’entreprise réussie, s’assurer peut néanmoins se révéler être une démarche complexe pour bon nombre d’entrepreneurs. Pour en parler, Bpifrance Création a interrogé Nathalie Rauch, directrice du développement chez Entrepreneurs de la cité.
Fondation reconnue d’utilité public, Entrepreneurs de la cité (EDLC) a pour vocation d’aider les créateurs vulnérables dans la protection de leur entreprise. Basée à Lyon, mais bénéficiant d’un rayonnement national, la fondation travaille en partenariat avec les réseaux d’aide à la création, « ce qui signifie que les gens qui viennent à nous doivent obligatoirement être accompagnés », précise Nathalie Rauch, directrice du développement chez Entrepreneurs de la cité. « L’objectif, à terme, est qu’au bout de quatre ans, ces entrepreneurs puissent retourner vers le marché classique ».
Bpifrance Création : Le sujet de l'assurance doit-il être pris en compte dès la phase de montage du projet de création d'entreprise ?
Nathalie RAUCH : Oui, un grand oui ! On ne mesure pas assez les difficultés que peuvent rencontrer les entrepreneurs en matière d’assurance. Et c’est malheureusement une réalité pour bon nombre d’entre eux. Cela peut être dû à un manque d’expérience, à une activité particulière ou même à des fournisseurs spécifiques. Dans d’autres cas, il arrive que l’entrepreneur ait du mal à trouver des tarifs en adéquation avec ses moyens.
C’est pourquoi prendre en compte ce sujet-là, dès le lancement de son activité, permet d’une part de quantifier les coûts (notamment quand on se lance dans un business model) et, d’autre part, d’identifier plus facilement les réorientations ou remaniements éventuels de l’entreprise, s’il y a un point de blocage.
Bpifrance Création : En matière d'assurance, quelle couverture est parfois négligée par les entrepreneurs ? A quels risques se trouvent-ils alors exposés ?
Nathalie RAUCH : L’assurance prévoyance – l’assurance de sa propre personne en cas d’arrêt de travail par exemple - est souvent négligée. Il n’est pas rare que les petits entrepreneurs se surestiment et pensent qu’ils ne seront jamais malades. Sauf qu’un accident ou une maladie, ça arrive plus souvent qu’on ne le pense.
L’autre aspect trop souvent mis de côté, par méconnaissance, c’est la responsabilité civile. Beaucoup d’entrepreneurs sont convaincus qu’ils sont protégés grâce à leur assurance habitation, or c’est complètement faux. L’assurance personnelle ne couvre jamais les risques professionnels. C’est notamment le cas pour les entrepreneurs travaillant de chez eux ou directement chez leurs clients.
Bpifrance Création : Vous avez un exemple ?
Nathalie RAUCH : Oui bien sûr ! C’était à l’occasion d’une formation que j’animais pour des professionnels de la restauration. Parmi les différents entrepreneurs présents, j’ai rencontré une dame qui proposait des prestations de cuisine à domicile. Si elle était parfaitement au fait de toutes les problématiques liées à la chaine du froid, elle avait cependant complètement mis de côté tout l’aspect assurantiel. Selon elle, ce n’était pas nécessaire au vu de sa profession. Grave erreur ! Je lui ai donc exposé un exemple concret afin qu’elle prenne la pleine mesure du problème. Si d’aventure il lui arrivait de laisser trainer un couteau sur son lieu de prestation et qu’un client venait à se blesser avec, l’accident serait alors de sa responsabilité. Je vous laisse imaginer sa surprise en apprenant cela !
Bpifrance Création : Quand l'activité est encore récente et les finances parfois fragiles, comment bien définir ses priorités en matière d'assurance ?
Nathalie RAUCH : Dans un premier temps, je dirais de se concentrer sur tout ce qui est obligatoire. Certaines activités réglementées nécessitent des assurances spécifiques, il est donc essentiel de bien se renseigner pour ne pas passer à côté.
Ensuite, je recommanderais de s’occuper de tout ce qui a trait à la responsabilité civile. Si un sinistre survient alors qu’on vient de lancer son activité, il est essentiel de pouvoir sauver son entreprise. Enfin, il ne faut pas oublier d’assurer son stock, son matériel et sa propre personne (dans l’éventualité d’un arrêt de travail). C’est le minimum.
Bpifrance Création : Quelles sont les autres garanties susceptibles de concerner les nouvelles entreprises ?
Nathalie RAUCH : Il y a par exemple les assurances invalidité et décès. Mais pour ceux qui ne pourraient pas souscrire à ces deux assurances - car cela à un coût, il ne faut pas l’oublier – Je recommande de prendre au moins la garantie arrêt de travail. C’est ce qui va vous permettre de sauver votre entreprise en cas de problème.
Bpifrance Création : Au-delà de l'offre de contrats d'assurance, quels sont les autres services que peut proposer un assureur à ses clients créateurs d'entreprise ?
Nathalie RAUCH : Il peut par exemple lui proposer un accompagnement dans la gestion de ses impayés, car c’est malheureusement l’un des risques que rencontrera peut-être un dirigeant au cours de sa carrière.
De notre côté, chez Entrepreneurs de la Cité, nous proposons un service d’audit de local. Dans les grandes lignes cela consiste à faire passer un expert gratuitement afin qu’il puisse vérifier l’état du local qu’envisage de louer l’entrepreneur. Au-delà de lui apporter un avis objectif et avisé, ce service lui permet surtout d’éviter des déconvenues et d’engager des discussions avec le bailleur si des travaux sont à prévoir par exemple.
Bpifrance Création : Passé les premières années d'activité de l'entreprise, de quelle manière l'assureur reste-t-il présent pour prolonger son rôle de conseiller ?
Nathalie RAUCH : Un assureur se doit de faire des suivis clientèle et d’aller aux devants de son assuré une fois par an. A cette occasion, il pourra vérifier si l’entreprise ou la situation de l’entrepreneur a changé, s’il a toujours le même chiffre d’affaires, s’il a plus de stock, plus de matériel ou même s’il a changé d’activité.
Il faut toujours que l’assurance soit calée aux besoins de l’entreprise. Par exemple, si vous êtes assuré pour 3 000 euros de stocks et que ce dernier monte à 15 000 euros, vous êtes alors sous-assuré. C’est pourquoi le rôle de l’assureur est de veiller à ce que votre contrat corresponde à votre besoin.