Pouvez-vous nous présenter votre nouvelle mission de coordonnateur national pour l'Entrepreneuriat Etudiant qui vient de vous être confiée ?
Le développement de la culture entrepreneuriale et du passage à l'acte des étudiants est favorisé par la généralisation des formations à l'entrepreneuriat et à l'innovation en licence, master et doctorat ou équivalent, dans toutes les filières de l'enseignement supérieur. Cette action s'appuie sur un appel à projet pour la création d'une trentaine de Pôles étudiants pour l'Innovation, le Transfert et l'Entrepreneuriat (Pepite) sur les différents sites d'enseignement supérieur du territoire. Le passage à l'acte entrepreneurial de l'étudiant va être structuré autour de trois dispositifs : - la possibilité, pour les étudiants ou les jeunes diplômés, d'avoir un statut d'étudiant entrepreneur ,- l'inscription dans un DU (diplôme universitaire) permettant de bénéficier d'un accompagnement mis en place avec nos partenaires,- un prix Pepite –Tremplin pour favoriser l'entrepreneuriat étudiant dans le cadre du concours de création d'entreprise de technologies innovantes – qui permettra d'aider des étudiants porteurs de projets innovants et ambitieux pour une croissance durable sur le territoire.
Un mot sur votre élection à la Présidence de l'Académie de l'Entrepreneuriat et de l'Innovation... ça ne fait pas beaucoup ?
Probablement Mais l'Académie de l'Entrepreneuriat et de l'Innovation (AEI) a deux qualités. Elle a vocation à développer la recherche mais aussi les formations en entrepreneuriat. Elle a notamment été le partenaire de l'APCE pour créer l'Observatoire des pratiques pédagogiques en entrepreneuriat. Avec une trentaine d'administrateurs et un conseil d'administration qui se réunit trois fois par an mais aussi des journées de recherche ou d'échanges sur l'éducation en entrepreneuriat, c'est un formidable réseau d'enseignants-chercheurs des universités ou des grandes écoles. Nous devons renforcer la reconnaissance de l'entrepreneuriat comme discipline dans les sciences de gestion, sinon nous prenons le risque d'une dilution.Pour moi, la concomitance de cette mission et de cette présidence est une véritable opportunité, parfaitement construite dans un même calendrier pour les trois prochaines années. Fédérer les réseaux de l'Académie et des Pepite est un premier enjeu des prochains mois. Les journées de l'OPPE de Poitiers m'ont convaincu de la dynamique qui s'enclenchait. Accentuer les relations avec les réseaux d'acteurs de la sensibilisation, de l'accompagnement et du financement est un deuxième enjeu.
Pouvez-vous nous présenter l'appel à projets Pepite ?
L'appel à projets Pepite a vocation à installer des pôles sur les sites d'enseignement supérieur, sur l'ensemble du territoire. Au regard de la mobilisation de la communauté de l'enseignement supérieur, nous couvrons tout le territoire avec 30 projets déposés dont 7 pour l'Ile de France. C'est une très grande satisfaction sans préjuger des évaluations. Ces pôles ont vocation à informer, sensibiliser, spécialiser, accompagner les étudiants dans le domaine de l'entrepreneuriat. En mutualisant les moyens, ils sont sources d'économies et d'efficacité (économie d'échelle et effet d'expérience). L'entrepreneuriat doit être présenté dans ses différentes dimensions. Tous les projets sont concernés : . démarches individuelles ou collectives, innovantes ou pas, . projets de création mais aussi reprise d'entreprise, . portés par différents publics comme l'entrepreneuriat féminin, dans différents domaines le numérique, l'ESS, le culturel....L'appel à projets Pepite insiste aussi sur les enjeux de pérennité des budgets, sur la gouvernance et sur les études d'impact.
Quels sont les grands changements qui en découleront ?
Cette structuration par site et au plan national doit favoriser une consolidation des bonnes pratiques. La culture entrepreneuriale doit donner de l'enthousiasme aux étudiants pour penser leur avenir, leur insertion professionnelle. L'entrepreneuriat s'appuie sur un apprentissage par l'action avec des vertus pédagogiques. Il peut être un moyen de nouvelles solidarités entre les étudiants par des projets dans l'entrepreneuriat social, par des centres de coworking mixant des étudiants entrepreneurs avec des projets à l'ambition variée. Une culture entrepreneuriale est une compétence recherchée par les entreprises, les organisations au sens large, y compris dans la fonction publique !
Cet appel à projets vient renforcer l'action des PEE, lancée en 2010. Trois ans après la création des premiers pôles entrepreneuriat étudiants. Quel bilan peut-on en faire ?
Avant les PEE, il y a eu les Maison de l'Entrepreneuriat avec la première à Grenoble en 2002. L'innovation a été de regrouper les forces, le "contenant". Mais les différentes expérimentations pédagogiques ont été lancées depuis plus de 20 ans à Montpellier, Lyon, Lille, Nancy, Bordeaux, Paris.Différents organismes publics ou privés ont fait des rapports positifs et encouragé le processus :Rapport de la Cour des comptes / Rapport Beylat-Tambourin / Assises de l'entrepreneuriat-mesures / Etude Ernst and YoungCette expérimentation a montré qu'il était possible de faire entrer l'entrepreneuriat dans toutes les filières et surtout que les étudiants étaient en demande (enquête réalisée sur le site de Toulouse). Plus de 80 000 étudiants ont suivi des modules en France en entrepreneuriat avec ECTS, des universités aux écoles de commerce en passant par les écoles d'ingénieurs. Des expérimentations ont été réalisées sur la reconnaissance des compétences à Poitiers, à Nantes, à Clermont-Ferrand, à Paris. Un réseau s'est structuré. Les échanges de pratiques ont été amorcés. Des étudiants sont passés à l'acte. Ils sont demandeurs d'un accompagnement par l'enseignement supérieur avec ses partenaires, même pour les diplômés des grandes écoles. Les partenariats entre pôles, incubateurs et pépinières sont aussi un élément important pour favoriser le passage à l'acte, comme a pu le développer le pôle de Troyes. D'autres pôles ont montré la voie pour communiquer (Strasbourg, Reims).J'ai été très impressionné par le dynamisme des jeunes chargés de mission embauchés par les pôles. Ce sont eux qui favoriseront la consolidation des bonnes pratiques au plan national.
Concrètement, quelles sont les actions menées par les Pepite aujourd'hui ? Quelles vont être celles de demain ?
Continuer à sensibiliser, former, accompagner les étudiants. Dès 2014, il faut rendre homogènes les actions afin d'être en capacité d'avoir des indicateurs d'impact et de construire une école française de l'entrepreneuriat sur la base des échanges de bonnes pratiques. Aller plus loin sur le passage à l'acte.
Quels seront les grands changements pour les Pepite ?
Les Pepite vont faire partie intégrante de l'offre des établissements dans le cadre des politiques de site avec les communautés d'universités et d'établissements (Comue). Cette institutionnalisation ne doit néanmoins ne pas leur faire perdre leur agilité, ils doivent rester sur un mode entrepreneurial, être irrigués par les étudiants, les enseignants-chercheurs, les partenaires des écosystèmes.
Si j'étais un jeune porteur de projet, que pourrait m'apporter un Pepite ?
Les Pepite sont le moyen d'acquérir des connaissances et des compétences entrepreneuriales. C'est un lieu d'accompagnement de projets avec un centre de coworking et des partenaires de l'accompagnement et du financement. Le Pepite attribue le statut d'Etudiant Entrepreneur. Il conseille le cas échéant pour construire différents dossiers notamment pour les concours et prix d'entrepreneuriat. Le Pepite favorise l'accès à différents réseaux. C'est un moyen de rompre avec le déterminisme sociologique.
Et si j'étais un enseignant, en quoi intégrer un Pepite me serait utile ?
C'est un lieu d'échanges. Pour un enseignant en général, c'est le moyen de découvrir l'entrepreneuriat, de rompre peut-être avec des représentations réductionnistes, de participer à la déclinaison de l'entrepreneuriat dans sa discipline Ils sont partout mais souvent ils s'ignorent : le comédien, l'interprète, le médecin, l'avocat, le chercheur...Pour les enseignants en entrepreneuriat, le Pepite est le lieu des échanges académiques et pédagogiques. C'est pourquoi, j'essaierai de rapprocher les Pepite de l'Académie de l'Entrepreneuriat et de l'Innovation dans les mois à venir.
Quels conseils donneriez-vous aux établissements et organismes pour les prochains mois ?
Il est important que les établissements aient pour représentation le site dans le domaine de l'entrepreneuriat en s'appuyant sur le Pepite afin de favoriser l'irrigation de toutes les formations, d'homogénéiser l'offre et de développer les programmes pluridisciplinaires.
Pour conclure ?
J'en ai souvent rêvé sous ma douche... Tout étudiant ayant accès à un Pepite, à des modules en entrepreneuriat et innovation, un DU sans condition de diplôme, du bouillonnement avec de nombreux passages à l'acte avec des valeurs éthiques... Mais avec un statut d'étudiant entrepreneur, Madame la Ministre nous a ouvert les possibles dans les maquettes pédagogiques. Avec ce statut, à nous d'avoir une démarche structurée et homogène sur le territoire et de réussir la mise en ouvre de ces actions ! La prochaine phase est le développement des Mooc et des plateformes d'échanges. Aller vers la reconnaissance des Mooc au même titre que les publications, voilà une nouvelle innovation prometteuse ! Le Pepite d'Aquitaine, ECA, devrait mettre en ligne un accélérateur de conception de business model dans les prochaines semaines... A suivre !