Le traitement des actifs immobiliers avant la cession d'entreprise

Dans cet article :

Le traitement des actifs immobiliers professionnels du chef d'entreprise est une question complexe qui implique une analyse à la fois juridique, patrimoniale, comp­table et fiscale. En la matière, il n'y a pas de "prêt-à-porter". Chaque solution a ses avantages et ses inconvénients, et seul du "sur mesure" pourra répondre réellement aux préoccupations du cédant ou repreneur d'entreprise. La problématique sera différente selon que le chef d'entreprise exerce son activité en individuel ou par l'intermédiaire d'une société.

Le traitement des actifs immobiliers au bilan de l'entreprise sous forme sociétaire

Détenir l'immobilier d'entreprise dans la société d'exploitation (SARL, SA, SAS, etc.) peut être un frein à la cession de l'entreprise. En effet, le repreneur devra acquérir l'intégralité de la société c'est-à-dire l'activité qu'elle exerce et les locaux dans lesquels elle est exploitée.
Or, cela peut représenter un budget trop important pour l'acquéreur qui pourrait préférer se contenter dans un premier temps de l'acquisition de l'outil d'exploitation, avant d'envisager l'achat ultérieur des murs professionnels.

Dissocier l'immobilier professionnel de la société d'exploitation, dès la création de l'entreprise ou avant de la céder, peut donc présenter toute son utilité. Plusieurs méthodes peuvent être appliquées.

  • Le recours à la société civile immobilière

L'immobilier d'entreprise peut être détenu par une société civile immobilière (SCI) qui louera ensuite les locaux à la société d'exploitation (SAS, SARL, etc.). Les loyers constitueront une charge déductible pour la société d'exploitation (comme l'auraient été les amortissements si l'immeuble était détenu directement par la société d'exploitation) et un revenu foncier pour la SCI dont le chef d'entreprise est associé.

Lors de la création de l'entreprise, l'achat des murs pourra se faire directement par la SCI constituée parallèlement par le chef d'entreprise et sa famille (conjoint, enfants éventuellement, etc.) ou d'autres partenaires.

Si cela n'avait pas été fait à l'origine, il est toujours possible au chef d'entreprise de "sortir" l'immobilier de sa société d'exploi­tation, soit en vendant les murs à une SCI, soit en l'y apportant.

Dans les deux cas, l'option fiscale de la SCI (IS ou IR) est à étudier avec précaution. Il faut prendre en compte :
- la période d'exploitation (imposition des revenus et dividendes, amortissement comptable ou non, etc.),
- ainsi que la sortie de l'immobilier (plus-values réalisées).

Les modalités de finan­cement de la SCI méritent également une attention particulière (montant du capital social, emprunt, compte-courant, etc.).

  • Le recours au démembrement de propriété

La dissociation des murs professionnels de la société d'exploitation peut être réalisée en combinant la SCI et le démembrement de propriété de l'immeuble lui-même, voire des parts sociales de la SCI.

Ainsi, la société d'exploitation peut détenir un usufruit temporaire de l'immeuble (maximum 30 ans) ; en sa qualité d'usufruitière, elle jouit de l'immeuble et peut donc l'occuper. Cela lui évite d'avoir à payer un loyer ; néanmoins, la société d'exploitation pourra :
- amortir l'usu­fruit,
- déduire les frais d'acquisition de cet usufruit,
- réaliser tous les travaux d'aménagements nécessaires,
- les amortir.

Quant à la nue-propriété, elle sera détenue par la SCI dont le chef d'entreprise sera associé. Certes, la SCI n'aura pas de revenus pendant toute la durée de l'usufruit. Mais à la fin de cet usufruit, elle deviendra propriétaire de l'immeuble. Il lui sera donc possible de donner l'immeuble à bail à la société d'exploitation. Cela procurera des revenus au chef d'entreprise qui lui permettront de compléter ses pensions de retraite.

Le traitement des actifs immobiliers de l'entrepreneur individuel

  • Inscription de l'immobilier à l'actif du bilan

L'entrepreneur qui exerce son activité à titre individuel a le choix d'inscrire ou non l'immeuble professionnel à l'actif de son bilan. Dans les deux cas, l'entrepreneur reste juridiquement propriétaire de l'immeuble puisqu'il n'est pas fait de distinction juridique entre le patrimoine privé et le patrimoine professionnel. L'affectation ou non au bilan n'aura que des conséquences comptables et fiscales.

Lorsque l'immeuble est inscrit à l'actif du bilan, toutes les charges liées à ces murs professionnels sont déductibles fiscale­ment du résultat de l'entrepreneur : frais d'acquisition, amortissement de l'immeuble, taxe foncière, dépenses d'entretien et réparation, etc.

En revanche, en cas de vente de l'immeuble, la plus-value sera imposée comme les plus-values professionnelles, à l'impôt sur le revenu, avec les autres résultats professionnels de l'exploitant (bénéfices industriels et commerciaux, non commerciaux ou agricoles), ce qui peut être très coûteux.

Il existe néanmoins plusieurs dispositifs d'exonération de plus-value, sous réserve de respecter des conditions biens précises.

  • Bail à soi-même

A l'inverse, si l'entrepreneur décide de conserver l'immobilier dans son patrimoine privé, il ne peut pas amortir le bien. Il peut toutefois se consentir un bail dont les loyers seront déductibles de son résultat professionnel, et ce que l'activité soit commerciale, industrielle, agricole ou libérale.

Mais en contrepartie, il sera imposable sur les loyers perçus dans les revenus fonciers.

L'avantage réside toutefois dans le traitement de la plus-value lors de la vente de l'immeuble. Il s'agira d'une plus-value privée qui sera exonérée si l'immeuble est détenu depuis plus de 22 ans.

Il convient par ailleurs de noter que dans l'hypothèse où l'immeuble est conservé dans le patrimoine privé de l'entrepreneur, celui-ci peut éventuellement envisager sa détention par l'intermédiaire d'une société civile immobilière (SCI), notamment dans une optique de transmission de son patrimoine.

Bien avant d'envisager la cession de son entreprise individuelle, le cédant devra donc définir si l'inscription ou non au bilan est préférable pour lui notamment en terme de plus-value. Mais compte tenu des délais souvent exigés pour pouvoir bénéficier des exonérations fiscales (entre 5 et 10 ans), la problématique de la transmission de l'entreprise doit être largement anticipée. Si le chef d'entreprise ne cède pas l'immeuble avec le fonds, une conservation dans le patrimoine privé, voire par l'intermé­diaire d'une SCI pourra s'avérer plus intéressante.

La mise en place de ces montages suppose une étude approfondie de la situation patrimoniale, juridique, fiscale et comptable du chef d'entreprise. Elle peut et doit être amorcée quelques années avant la décision de transmettre l'entreprise. Votre notaire est votre conseil privilégié pour appréhender toutes ces questions et vous accompagner dans vos projets. www.notaires.fr
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