Le coworking : une autre manière d'entreprendre !

Pouvez-vous nous parler de votre idée ? Comment est-elle née ?

L'idée s'est construite progressivement. Créer un espace de coworking était à l'origine une réponse à nos propres besoins. En tant que designer ou graphiste, travailler chez soi, peut constituer un frein au développement de son activité. Nous avions tous les mêmes problématiques : manque d'infrastructure et de logistique, réseau professionnel restreint, etc. De fait, notre idée a convergé avec les aspirations d'autres, qui reflètent plus largement une évolution de la société.

Quels sont les services proposés aux coworkers ?

Nous mettons à disposition des coworkers des bureaux, des espaces de rangement, des salles de réunion, une cuisine, un coin salon, et l'accès à un jardin. Nous proposons également une connexion Internet, des services de bureautique et l'accès à un réseau de contacts professionnels. Mais au delà de l'aspect pratique et économique, l'intérêt symbolique est très fort. Notre espace permet de lutter contre l'isolement professionnel et de rapprocher des compétences diverses de manière informelle ou formelle, grâce à l'organisation de rencontres et d'évènements. L'atmosphère agréable est propice aux échanges. Par ailleurs, l'espace de coworking permet de séparer sphère professionnelle et sphère privée et de canaliser le stress des travailleurs indépendants habitués à travailler chez eux.

Coworking

Comment votre offre se distingue-t-elle de celle des concurrents ?

On ne se distingue pas par l'offre de services ou par le prix. Nous ne sommes pas du tout dans une démarche concurrentielle agressive. Ce qui fait la différence, c'est avant tout l'implantation du lieu dans un hôtel d'entreprises qui réunit environ 80 startups. Le cadre est donc plus professionnel. Nous souhaitons aussi conserver une grande diversité des activités exercées par les coworkers. Le but, étant que les compétences complémentaires se rencontrent. L'aspect participatif est également très marqué. Notre but n'est pas d'organiser des services et des évènements "clés en main". Nous souhaitons laisser place aux initiatives individuelles, pour que les travailleurs donnent forme au lieu par leur présence.

Comment démarchez-vous vos futurs coworkers ?

Nos coworkers sont des indépendants, des petites structures. Nous prenons contact avec toutes sortes de prescripteurs : banques, organismes chargés d'aider les créateurs d'entreprises, etc. mais aussi des têtes de réseaux professionnels.

Quel rôle joue Internet dans votre projet ?

L'utilisation d'Internet et des réseaux sociaux est évidente. Mais il ne faut surtout pas négliger le relationnel direct : bouche à oreille, prise de rendez-vous, rencontres, etc.

Quelles sont vos perspectives de développement ?

A court terme, nous souhaitons tout simplement que les Studios Singuliers fonctionnent et soient un lieu de vie, que les coworkers se l'approprient. Sur le long terme, nous souhaiterions développer des partenariats avec d'autres espaces, voire en créer de nouveaux. La mise en place d'évènements ponctuels, et la coopération avec d'autres communautés au niveau international va aussi dans le sens de notre démarche.

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Quelles difficultés avez-vous rencontrées ?

Le financement a été le problème majeur. Pour les banques, le projet, constitué sous forme d'association, ne semblait pas suffisamment rentable pour qu'elles se penchent dessus, jusqu'à ce que le Crédit Coopératif décide de nous suivre. Les difficultés pour trouver un local, malgré un marché immobilier parisien tendu, se sont vite résolues. Nous pouvons dire que globalement tout c'est très bien passé, et le parcours a été très enrichissant.

Qui vous a aidé dans votre projet ?

Nous avons été accompagnés dans la recherche de financement par la boutique de gestion qui nous a proposé de rencontrer le Crédit Coopératif. Les mairies, notamment des 11ème, 18ème, 19ème et 20ème arrondissements de Paris, nous ont orientées dans nos démarches. L'Atelier Ile-de-France nous a donné de précieux conseils, ainsi que Plaine Commune et Est Ensemble. La Fonderie nous a également fourni une lettre de recommandation et enfin Neo-Nomade nous a aidé à finaliser notre business plan.

Si c'était à refaire, agiriez-vous de la même manière ?

Oui, dans les grandes lignes ! Même si nous avons beaucoup évolué personnellement, il y a des étapes incontournables. Par exemple, il est important de bien comprendre ce qu'attendent les différents interlocuteurs que nous avons rencontrés (banque, structure d'accompagnement, bailleur, etc.). Nous aurions également pu prendre plus de temps pour créer une communauté de coworkers en amont et attendre d'avoir une plus grande capacité de financement pour convaincre nos interlocuteurs plus facilement.

Vous êtes vous surpris dans cette expérience ?

Oui ! Une chose est sûre : il faut être un peu "aveugle" au début ou du moins "naïf". Nous nous sommes étonnés par l'audace et l'assurance que l'on a pu trouver pour défendre notre projet, et par notre capacité à diriger une entreprise. Nous avons également appris à nous adapter à toutes sortes de situations, à apprendre à rester attentifs aux évènements et à nos interlocuteurs. Avoir une capacité de résilience est également indispensable lorsque l'on entreprend : il faut toujours rebondir. Le fait de ne pas être seul développe la confiance en soi. On est maintenant surpris d'être ici et il semble loin le temps des discussions autour du projet dans un 15 m2.

Votre quotidien correspond-t-il à ce que vous imaginiez ?

Oui, globalement. Même si le quotidien ne peut pas être anticipé, il s'imagine et se construit en avançant ! Il faut toujours se laisser une marge d'improvisation et de création.

Où en êtes-vous aujourd'hui ? Quels sont vos projets ?

Nous sommes heureux du travail accompli. Les Studios Singuliers sont un très bon outil pour développer notre propre activité. Cela nous a ouvert des portes sur des projets de plus grande ampleur. Mais comme tous les outils, sa technicité doit toujours être améliorée. La création de l'espace n'est pas une fin en soi, mais plutôt un processus, un tremplin vers d'autres projets. Par la suite, on désire passer la main aux personnes qui viennent travailler ici et poursuivre une multitude de coopérations avec d'autres structures dans le monde. A des niveaux plus personnels, nous voulons développer nos activités vers des projets stimulants. Continuer dans ce cadre une réflexion sur l'usage et les comportements vis à vis des objets qui nous entourent. Idéalement, nous souhaiterions que notre travail reste connecté aux enjeux humains, environnementaux et économiques de notre société.

Propos recueillis en mai 2013 par Yoann Rotureau

Juin 2013