Too Good To Go casse les codes du travail. L’application anti-gaspillage alimentaire Too Good To Go ne met pas ses équipes dans des cases. L’entreprise de 1 200 salariés a décidé d’inventer son management, basé sur le droit à l’erreur et la culture de l’échange.
Co-fondée en 2016 par la française Lucie Basch, l’application Too Good To Go (TGTG) a été téléchargée par plus de 9,5 millions de Français. L'entrepreneure a su insuffler des valeurs fortes à son entreprise en pleine croissance grâce à un management horizontal sur mesure.
Dès les débuts de TGTG, saviez-vous précisément quelle direction vous souhaitiez donner à votre management ?
Lucie Basch : Je me suis pas mal intéressée au sujet de l’entreprise libérée, de l’entreprise altruiste que décrit notamment Isaac Getz. Cependant, je me suis vite rendu compte qu’on ne pouvait pas tout tester et mettre en place dans une entreprise en hypercroissance. Aujourd’hui, je pense qu’on a trouvé un juste milieu entre des valeurs qui nous correspondent et une hiérarchie structurelle qui permet des prises de décision décentralisées.
A quels écueils entre théorie et pratique avez-vous été confrontée aux débuts de TGTG ?
Lucie Basch : Il y a une différence entre ce que l'on pense que les gens veulent et ce que les gens attendent vraiment. Notre système éducatif et professionnel nous prépare surtout à rentrer dans une case, à avoir des attentes prédéfinies. Chez TGTG, on a plutôt tendance à dire qu’il faut laisser les gens créer leur job, mais on a tellement été préparés à rentrer dans des cases que c’est souvent difficile de se projeter au-delà. Je pense qu’il est important que chaque employé puisse trouver sa place dans l’entreprise sur qui ils sont, et non que sur leur CV ou profil.
En quoi le rôle de manager chez TGTG est différent de celui d’une entreprise “traditionnelle” au management descendant ?
Lucie Basch : Chez nous, le manageur doit permettre aux personnes de son équipe de se réapproprier leur poste, tout en donnant les directions nécessaires pour que chacun sache où aller. On va laisser la personne prendre des décisions, commettre ses erreurs et les résoudre. On apprend énormément de ses erreurs, donc c’est important qu’on puisse se sentir à l’aise pour en parler avec son manager mais également qu’on reste acteur de la façon dont on trouve une solution.
TGTG est présent dans une quinzaine de pays d’Europe et vous préparez actuellement son lancement aux Etats-Unis. Est-ce que votre management sur mesure est déclinable dans toutes vos filiales ?
Lucie Basch : Des variantes culturelles sont nécessaires pour chaque pays, surtout aux Etats-Unis. C’est un système de travail qui est complètement distinct du nôtre et les attentes des employés là-bas sont différentes : il faut créer la confiance puisque, par défaut, les Américains sont très méfiants vis-à-vis de leur employeur. Il y a un travail important à faire sur la réaffirmation des valeurs.
Quels seraient vos conseils aux entreprises désireuses de libérer leur management mais réticentes à se lancer ?
Lucie Basch : Je suis intimement persuadée que c’est la seule façon de se développer et de construire des équipes solides et puissantes. Plus on donne de responsabilités aux personnes dans un environnement où elles se sentent en sécurité, plus elles deviendront meilleures dans ce qu’elles font pour l’entreprise. Il faut prendre la décision difficile d’accepter d’avoir moins de contrôle parce que c’est comme ça qu’on permettra à l’entreprise de mieux se développer.