Dans cet article :
Souvent méconnu, le bail professionnel se distingue par sa souplesse et son cadre juridique spécifique, différent du bail commercial. Il séduit les professions libérales par sa flexibilité, tout en imposant des règles claires à respecter. Avant de signer, mieux vaut maîtriser les conditions de validité, les droits et devoirs de chaque partie, ainsi que les implications juridiques en cas de rupture.
Bail professionnel : définition
Le bail professionnel est un contrat de location portant sur des locaux utilisés exclusivement pour l’exercice d’une activité libérale, qu’elle soit réglementée (médecins, avocats, architectes, experts-comptables, vétérinaires, etc.) ou non réglementée (consultants, coachs, conseillers, etc.).
A noter : Le bailleur et le locataire, peuvent s’entendre pour soumettre volontairement le bail professionnel au régime du bail commercial. Dans ce cas, l’ensemble des règles applicables au bail commercial s’appliquent. Dans ce cas, l’ensemble des règles applicables au bail commercial s’appliquent.
Lorsque les locaux sont à la fois à usage d'habitation et à usage professionnel, on parle de bail mixte. Dans ce cas, le bail est soumis à la réglementation encadrant les baux d'habitation. En pratique, le bail mixte est utilisé par les professionnels libéraux exerçant leur activité professionnelle à leur domicile.
Avant de signer un bail professionnel, assurez-vous que le local est bien affecté à un usage professionnel au regard des règles d’urbanisme. Si ce n’est pas le cas, un changement d’usage peut être nécessaire, notamment dans certaines communes.
Le régime des baux professionnels
Forme du bail professionnel
Le contrat de bail professionnel doit impérativement être formalisé par écrit. Sa rédaction peut être assurée par les parties elles-mêmes, un avocat ou un notaire.
Toutefois, lorsque la durée du bail dépasse 12 ans, l’intervention d’un notaire devient obligatoire pour assurer sa validité.
Le contenu du bail professionnel est librement déterminé par les parties. Le plus souvent, il comporte les mentions suivantes :
- identité et obligations des parties,
- description du local et, le cas échéant, des locaux annexes,
- durée du bail (6 ans minimum),
- dépôt de garantie, montant du loyer, conditions de paiement et de révision du loyer,
- répartition des charges entre propriétaire et locataire, etc.
Durée du bail professionnel
Le bail professionnel est conclu pour une durée au moins égale à 6 ans. Au terme de ce délai, le bail est reconduit tacitement pour la même durée.
Le locataire peut, à tout moment en cours de bail, notifier au bailleur son intention de quitter les locaux en respectant un délai de préavis de 6 mois, par lettre recommandée avec AR ou par acte de commissaire de justice.
Fixation et révision du loyer
Le loyer et ses modalités de paiement sont déterminés librement par les parties lors de la conclusion du bail.
La loi ne prévoit pas de révision automatique du loyer dans le cadre d’un bail professionnel. Toutefois, le contrat peut inclure une clause de révision, généralement indexée sur un indicateur économique tel que l’indice des loyers des activités tertiaires (ILAT) ou l’indice du coût de la construction (ICC).
Si aucune clause de révision n’est prévue dans le bail, le loyer reste inchangé pendant toute la durée du contrat.
Contrairement au bail commercial, il n’existe pas de mécanisme légal de plafonnement des loyers pour un bail professionnel. Il faudra donc être particulièrement attentif aux clauses relatives à la fixation et à la révision du loyer au moment de la signature du contrat.
Destination des locaux
La destination est distincte de l’affectation au sens du droit de l’urbanisme. L’affectation est fixée par le permis de construire (habitation, commerce, bureaux, etc.), tandis que la destination est définie par les parties dans le contrat de bail.
La clause de destination encadre strictement l’activité exercée dans les locaux. Le locataire ne peut pas exercer une activité différente de celle prévue au contrat sans l’accord du bailleur.
Généralement, toute modification de la destination nécessite l’accord du bailleur. Elle peut être formalisée par un avenant au bail. Si le local est situé dans une copropriété, le changement de destination peut aussi nécessiter l’accord de l’assemblée générale des copropriétaires, selon le règlement de copropriété.
En cas de non-respect de la destination, le bailleur pourrait demander la résiliation du bail ou des dommages et intérêts.
Dépôt de garantie
Le dépôt de garantie est une somme d’argent versée par le locataire au moment de la signature du bail, destinée à couvrir d’éventuels manquements à ses obligations (dégradations, réparations non effectuées, ou éventuellement les impayés de loyers si le bail le prévoit).
Le versement d’un dépôt de garantie n’est pas imposé par la loi dans le cadre d’un bail professionnel. Toutefois, les parties peuvent convenir contractuellement que le locataire devra en verser un. Dans ce cas, le montant est librement fixé par le bailleur et le locataire, sans plafond légal.
Cette somme est restituée au locataire à la fin du bail, sous réserve qu’il ait respecté l’ensemble de ses engagements contractuels.
Etat des lieux
L’état des lieux est obligatoire dans le cadre d’un bail professionnel, tant à l’entrée qu’à la sortie des locaux. Il doit être établi contradictoirement, c’est-à-dire en présence du bailleur et du locataire (ou de leurs mandataires).
L’état des lieux peut être réalisé à l’amiable ou, en cas de désaccord, par un commissaire de justice. Les frais d’intervention sont partagés à parts égales entre les deux parties.
A noter : En l’absence d’état des lieux d’entrée, le locataire est présumé avoir reçu les locaux en bon état, ce qui peut lui être défavorable en fin de bail.
Il est recommandé d’y inclure les mentions suivantes :
- date de réalisation de l’état des lieux ;
- identité et coordonnées des parties (bailleur et locataire) ;
- adresse complète du local loué ;
- relevés des compteurs (eau, gaz, électricité) ;
- description pièce par pièce de l’état des murs, sols, plafonds, fenêtres, installations techniques, mobilier éventuel ;
- photographies (fortement recommandées) ;
- signatures des deux parties.
Répartition des charges et impôts
Le locataire prend généralement en charge les réparations locatives et le menu entretien, tandis que les grosses réparations restent en principe à la charge du bailleur, sauf clause contraire.
Les taxes foncières, taxes d’enlèvement des ordures ménagères, charges de copropriété, ou redevances d’assainissement sont à la charge du bailleur, sauf clause les transférant au locataire.
Tribunal compétent
Les conflits portant sur un bail professionnel (ou un bail commercial) sont de la compétence du tribunal judiciaire du lieu de situation du local professionnel.
La fin du bail professionnel
En principe, le bail professionnel prend fin au terme prévu. Toutefois, il existe certaines situations dans lesquelles il va prendre fin de manière anticipée.
La résiliation du bail
Le locataire professionnel peut mettre fin au bail à tout moment, sous réserve de respecter un préavis de 6 mois. Ce préavis est notifié par lettre recommandée avec AR ou acte de commissaire de justice.
Quant au bailleur, il ne peut résilier le bail qu’à son terme, soit après 6 ans minimum, en respectant un préavis de 6 mois.
A noter : aucun motif particulier n’est requis pour résilier le bail, sauf clause spécifique dans le contrat.
Le renouvellement du bail
À l’issue du bail, le contrat est tacitement reconduit pour la même durée si aucune des parties ne donne congé.
Mais contrairement au bail commercial, le locataire professionnel ne bénéficie pas d’un droit au renouvellement. Cela signifie que le bailleur peut refuser le renouvellement sans avoir à justifier sa décision ni verser d’indemnité.
Si les parties ont volontairement soumis le bail professionnel au régime du bail commercial, le locataire peut bénéficier du droit au renouvellement et, en cas de refus, d’une indemnité d’éviction.
La cession et sous-location du bail professionnel
Le locataire a le droit de sous-louer ou de céder librement son bail si cette faculté ne lui est pas interdite par une clause du contrat de bail.
En cas de cession du bail professionnel, le locataire doit en informer le bailleur dans les conditions prévues au contrat (ex : notification par acte de commissaire de justice, délai à respecter). En l'absence de précision, une lettre recommandée avec AR suffit.
Une clause du bail peut prévoir des conditions particulières comme l'agrément préalable du successeur par le bailleur ou la rédaction d'un acte authentique.
En cas de sous-location, le bailleur doit en être informé. Le locataire principal demeure tenu envers le bailleur de l'exécution des obligations issues du bail, comme s'il occupait lui-même les locaux.
La vente des murs loués
Dans le cadre d’un bail professionnel, le locataire ne bénéficie pas d’un droit de préférence (ou droit de préemption) en cas de vente des murs par le bailleur.
Autrement dit, le bailleur peut vendre librement à un tiers, sans avoir à proposer au locataire d’acheter le bien en priorité.
Une clause de préférence peut être ajoutée au bail, en mentionnant les modalités de notification, les délais de réponse, et les conditions de vente.
Quelles différences entre bail professionnel et bail commercial ?
Bien que le bail professionnel et le bail commercial soient tous deux des contrats de location de locaux à usage non résidentiel, ils obéissent à des régimes juridiques distincts.
Voici un tableau comparatif pour mieux comprendre les principales différences entre ces deux types de baux.
Bail professionnel | Bail commercial | |
---|---|---|
Activité concernée | Professions libérales (réglementées ou non) | Activités commerciales, industrielles ou artisanales |
Durée minimale | 6 ans | 9 ans (avec possibilité de résiliation triennale) |
Renouvellement automatique | Tacite reconduction, mais pas de droit au renouvellement | Droit au renouvellement du bail |
Indemnité d'éviction | Non prévue | Oui, en cas de refus de renouvellement sans motif légitime |
Résiliation par le locataire | Possible à tout moment avec préavis de 6 mois | Tous les 3 ans, avec préavis |
Résiliation par le bailleur | Possible, uniquement à l'échéance, avec préavis de 6 mois | Sous conditions strictes |
Formalisme du bail | Ecrit obligatoire ; notarié si durée supérieure à 12 mois | Ecrit recommandé, mais pas obligatoire |
Révision du loyer | Libre, application possible d'une clause d'indexation (ILAT, ICC, etc.) | Révision triennale |
Sous-location | Possible, sauf clause contraire | Interdite, sauf clause contraire |
Droit de préférence en cas de vente des murs | Non prévue par la loi | Oui, droit de préemption légal |
Textes de références
- Article 57 A de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986
- Article 57 B de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986
- Article L145-2 du Code de commerce
- Article 1406 du Code général des impôts
- Article 606 du Code civil
- Article 1717 du Code civil
- Article 1754 du Code civil
- Articles L631-7 et suivants du Code de la construction et de l'habitation
- Article R211-3-26 Code de l’organisation judiciaire
Foire aux questions
Avant de signer un bail professionnel, il est judicieux pour le locataire de préparer les pièces suivantes :
- pièce d’identité (signataire du bail et responsable de la société),
- justificatif d’activité libérale (attestation URSSAF ou inscription à l’ordre professionnel),
- extrait Kbis et statuts à jour (si société),
- pouvoir du représentant légal (si signature par un mandataire),
- justificatif de domicile personnel (facture, quittance…),
- attestation d’assurance multirisque professionnelle (souvent exigée),
- RIB (pour les prélèvements automatiques éventuels),
- garantie bancaire ou caution (si prévue au contrat).