Qamiab, une jeune pousse de la banlieue lyonnaise a remporté le mois dernier, le concours Talents des cités 2020, dans la catégorie Emergence. Elle propose une gamme de compléments alimentaires à base de safran. Rencontre avec Abderhaman Nour Ebad, l’un des quatre co-fondateurs.
L'objectif de Qamiab est de commercialiser une gamme de compléments alimentaires à base de safran produit en Afghanistan selon des critères éthiques. Abderhaman Nour Ebad, l’un des quatre co-fondateurs, revient sur les ambitions de Qamiab, qui a un double sens en persan : rareté et réussite.
Quel est votre sentiment après avoir remporté le concours Talents des cités ?
Ce prix est un grand honneur pour nous qui sommes issus des Quartiers prioritaires de la ville. Nous sommes fiers de pouvoir les représenter et nous avons désormais la responsabilité de partager et de transmettre notre expérience, car les talents ne manquent pas dans nos quartiers.
Pouvez-vous revenir sur la genèse de votre projet ?
Je suis d’origine afghane et en 2015 nous avons commencé, avec mes associés, à nous intéresser au safran, appelé l’or rouge, épice la plus chère du monde. Après nos études respectives et des expériences dans le e-commerce, nous avons décidé de nous lancer en 2019. Au cours de cette première année passée dans un incubateur de Lyon, nous avons réalisé des études de marché et prospecté pour la mise en place d’une logistique la plus directe possible afin de garantir la traçabilité du safran, un produit très contrefait. Fin 2019, nous avons lancé une campagne de financement participatif qui nous a permis de fédérer une communauté et de faire parler du projet.
En quoi votre entreprise est-elle éthique ?
Qamiab a plusieurs dimensions éthiques. D’abord, le safran constitue une alternative à la culture du pavot, base de l’opium qui ravage le pays. Ensuite, la culture de l’or rouge encourage l’employabilité des femmes afghanes, sachant qu’elles représentent déjà 80 % de la main d’œuvre. À terme, nous visons également de développer leurs compétences dans d’autres domaines que la cueillette et le tri des fleurs. Enfin, il y a aussi la dimension migratoire : la culture du safran permet l’essor des campagnes et la diminution de l’exode rural, tout en réduisant l’exil à l’étranger de la jeunesse, qui n’a connu que la guerre ces 30 dernières années.
Comment le programme Entrepreneurs de la ville vous accompagne-t-il ?
Nous l’avons débuté en mars 2020 et nous avons notamment suivi des cours de marketing à l’EM Lyon. Ce programme nous a permis de pivoter vers le complément alimentaire à base de safran et de formaliser concrètement notre proposition de valeur à destination des consommateurs. Le safran a de nombreuses vertus pour lutter contre les problèmes de sommeil, de stress ou de douleurs menstruelles. Mais, généralement, les consommateurs ne terminent pas les cures de compléments alimentaires, souvent assimilés à des médicaments. En outre, le safran n’est pas couramment utilisé en tant qu’épice en France. Nous avons donc décidé d’innover et d’améliorer l’expérience client avec un complément alimentaire sous forme de pâte de fruits au safran. Nous sommes les premiers à le faire.
Pour conclure, quels sont vos projets de développement ?
Nous poursuivons notre phase de levée de fonds (120 000 € actuellement sur notre besoin initial de 250 000 €) et le développement de nos compléments alimentaires, qui seront commercialisés en ligne, début 2021, sous la marque Naali (“jeune pousse” en persan), avant peut-être d’intégrer des pharmacies en 2022. Dans le même temps, nous allons vendre du safran en filament à des professionnels (restaurants, laboratoires…).