Responsabilité du dirigeant

Dans cet article :

En devenant chef d'entreprise, le créateur va engager sa responsabilité sur plusieurs terrains : pénal et civil. La responsabilité pénale sert à réprimer. La responsabilité civile permet, elle, de réparer un préjudice. Une même infraction peut entraîner à la fois la responsabilité pénale et civile du dirigeant.
Les dirigeants de fait encourent les mêmes sanctions et responsabilités que les dirigeants de droit.

Responsabilité pénale du dirigeant

  • Quand est-il responsable ?

Sa responsabilité pénale sera engagée même s'il n'a pas participé personnellement à l'infraction et même s'il n'y a pas de préjudice.
Il suffit qu'il y ait infraction à un texte pénal.

Le dirigeant peut s'exonérer de cette responsabilité dans les cas suivants.

  • S'il prouve qu'il n'était pas en mesure d'influencer le comportement de l'auteur de l'infraction.

Ex. : accident causé par un chauffeur alors que l'entreprise ne lui avait imposé aucun délai impératif de livraison, que le temps réglementaire de conduite n'avait pas été dépassé.

  • En déléguant ses pouvoirs à une personne (ex. : salarié), pourvue de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires pour faire respecter la réglementation. Cette délégation ne doit pas être ambiguë.

    Selon le ministre du Travail, les délégations de pouvoirs ne se justifient que dans les grandes entreprises et non dans les petites entreprises notamment celles présentant un caractère artisanal.

A noter : un arrêt de la Cour de cassation du 13 juin 2012 (n°11-85280) précise que la délégation de pouvoir accordée à une personne frappée d'une interdiction de gérer n'exonère pas le dirigeant de sa responsabilité pénale.

  • Qui peut engager sa responsabilité ?

L'action pénale est toujours engagée par le ministère public (magistrat représentant l'Etat). Parallèlement, les victimes (associés, tiers) peuvent se "constituer partie civile", c'est-à-dire demander réparation d'un dommage auprès d'une juridiction répressive.
Les tribunaux compétents sont le tribunal de police ou correctionnel, la cour d'assises, etc.

  • Pour quelles infractions ?
  • Infractions propres à l'activité spéciale de l'entreprise.

Ex. : transport routier, industrie alimentaire, débit de boissons, BTP, etc.

  • Infractions à la réglementation générale.

Ex. : réglementation du travail, fiscalité, douanes, lutte contre la pollution, code de la route, non respect des formalités de la vie sociale, abus de biens sociaux, vol, etc.

La plupart des infractions pénales sont sanctionnées par des peines de prison et/ou des amendes.

  • Responsabilité pénale des personnes morales

Une personne morale (société civile ou commerciale, association, GIE, collectivités territoriales, etc.) peut être condamnée pénalement lorsqu'une infraction a été commise pour son compte par l'un de ses organes de direction ou par toute autre personne au titre d'une délégation de pouvoir.

Sa responsabilité peut être engagée même si le texte prévoyant l'infraction ne l'envisage pas expressément.

Le comité d'entreprise doit être informé des poursuites pénales engagées contre la société.

Les sanctions sont bien sûr adaptées : dissolution de la société, interdiction de faire appel public à l'épargne, d'exercer certaines activités. Le plafond maximum des amendes est 5 fois supérieur à celui applicable aux personnes physiques.

Chaque groupement est doté d'un casier judiciaire qui récapitule l'ensemble de ses condamnations. Il peut être obtenu par certains organismes comme l'Autorité des marchés financiers (AMF) ou l'administration et les collectivités locales.

La responsabilité des personnes morales n'exclut pas pour autant celle du chef d'entreprise qui peut être prononcée pour une même infraction !

Responsabilité civile du dirigeant

  • Quand est-il responsable ?

La responsabilité civile du dirigeant sera engagée s'il est prouvé qu'il a commis une faute, source pour l'entreprise ou les tiers, d'un préjudice réparable.
Si plusieurs dirigeants ont participé à l'infraction, leur responsabilité solidaire sera engagée. Le tribunal déterminera la part contributive de chacun dans la réparation du dommage.

  • Qui peut engager sa responsabilité ?

L'action en responsabilité civile peut être engagée :

  • par un associé ou un tiers ayant subi personnellement un dommage (action individuelle),
  • ou lorsqu'il s'agit de réparer un préjudice subi par la société (action sociale) :

- un associé agissant individuellement,
- des associés représentant au moins 10 % du capital,
- des créanciers dans le cadre d'une procédure collective.

A l'égard des tiers à la société, la responsabilité civile pour faute du dirigeant ne peut être engagée que si sa faute est séparable de ses fonctions et qu'elle peut lui être imputée personnellement. En pratique, elle doit être commise intentionnellement et d'une gravité particulière. Par exemple :

- le fait pour le dirigeant d'autoriser un salarié à utiliser un véhicule de la société dépourvu d'assurance. Si le salarié entre en collision avec un autre véhicule et blesse son utilisateur, le dirigeant peut être condamné personnellement,
- le fait pour un gérant de SARL exerçant dans le domaine du BTP de ne pas souscrire d’assurance décennale.

- Tribunaux compétents : tribunal d'instance, de grande instance, de commerce.

  • Pour quelles infractions ?
  • Infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables à l'entreprise

Il s'agira par exemple de l'inobservation des formalités de constitution ou des prescriptions relatives à la présentation des comptes sociaux.

  • Violation des statuts

Le dirigeant n'a pas respecté une clause des statuts l'obligeant par exemple à obtenir l'accord préalable des associés pour tout emprunt dépassant un certain montant.

  • Fautes de gestion

La notion de faute de gestion n'est pas définie par la loi. Elle est précisée par la jurisprudence. C'est une notion très vaste ; elle peut aller de la simple imprudence aux manœuvres frauduleuses.


Depuis la loi du 9 décembre 2016 qui encadre la définition de la faute de gestion, la simple négligence dans la gestion de la société n'est plus qualifiée de faute de gestion.

Une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif peut entraîner la condamnation du dirigeant à payer tout ou partie des dettes de l'entreprise : il s'agit de l'action en comblement du passif social. Mais, le tribunal de commerce peut étendre une procédure collective touchant l'entreprise à son dirigeant, dans le cas où celui-ci a confondu son patrimoine avec celui de la société ou si la société qu'il dirige est fictive.
Est considéré comme une faute de gestion, le fait pour un dirigeant de n'avoir pas tenter d'obtenir des associés une augmentation du capital en numéraire, celle-ci s'avérant nécessaire à la survie de la société
(A
rrêt de la Cour de cassation 12 juillet 2016, n° 14-23310)

Un dirigeant d'une société dont les résultats étaient lourdement déficitaires, a été condamné à combler une partie du passif de son entreprise, au motif qu'il s'était octroyé une rémunération excessive et qu'il avait par ailleurs usé des biens de la société pour favoriser une autre entreprise qu'il dirigeait.
(Arrêt de la Cour de cassation du 28 juin 2017 n°14-29936)

  • Infractions aux obligations fiscales

En principe, le dirigeant ne répond pas personnellement des impôts dus par la société.
Sauf si leur paiement a été rendu impossible par "ses manœuvres frauduleuses ou par ses inobservations graves et répétées des obligations fiscales".
Ex. : minoration des déclarations de TVA, défaut de paiement des taxes pendant une longue période.

  • Infractions aux obligations sociales

Si la société ne paye pas les cotisations de sécurité sociale, le dirigeant peut être condamné à verser des pénalités (éventuellement des dommages et intérêts pour le préjudice qu'il a pu causer à la caisse de sécurité sociale). Mais il n'a pas, en principe, à verser le montant des cotisations et des majorations de retard dont le paiement n'incombe qu'à la société.

  • Infractions aux règles de concurrence

L'associé d'une SARL peut exercer une activité concurrente de celle de la société sans informer celle-ci mais il doit s'abstenir d'actes de concurrence déloyale. En revanche, l'obligation de loyauté et de fidélité qui pèse sur lui en sa qualité de gérant lui interdit de négocier, en qualité de gérant d'une autre société, un marché dans le même domaine.

Il est a noter que la radiation d'office d'une société par le greffe du tribunal de commerce pour cessation d'activité ne met pas fin au mandat du gérant, sauf si ce dernier a été nommé pour une durée limitée. Le gérant peut donc valablement représenter la société en justice, même après sa radiation d'office (C. de cassation 4 mars 2020).
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