L'Atelier Pain & Gâteaux, un rêve devenu réalité pour Jacques et Sandie Brassart

Vous avez obtenu le 1er prix du concours 2017 des jeunes entrepreneurs de boulangerie organisé par les Grands Moulins de Paris. Pourquoi avez-vous souhaité y participer ?

Nous connaissons ce concours depuis longtemps. Nous y avons participé une première fois il y a 10 ans et sommes arrivés 5ème, ce qui nous a permis d'obtenir une dotation. Mais à cette époque nous n'étions pas encore prêts à nous installer. Notre projet ayant mûri, nous avons décidé de retenter notre chance en 2017 avec cette fois-ci la ferme intention de nous installer et d'obtenir une dotation plus intéressante en remportant le premier prix. Forts de notre expérience, nous savions que pour y parvenir, il fallait arriver avec un dossier très sérieux.

Qu'est ce qui a fait la différence avec les autres candidats ?

Tout d'abord la qualité de notre étude de marché, que nous avons réalisée nous-mêmes avec beaucoup de sérieux. Nous nous sommes également distingués au niveau de la fabrication et présentation des produits. Enfin, malgré le stress, notre expérience nous a permis de montrer une certaine assurance qui a plu au jury.

Quel a été le déclic pour vous lancer ?

Au-delà d'un projet, c'est un rêve. Je suis tombé dedans lorsque j'étais petit puisque mes parents étaient dans le métier. Ils m'ont transmis le virus de l'entrepreneuriat et appris ce qu'il faut faire et ne pas faire. Mon épouse m'aide énormément en prenant en charge la partie vente. Je pourrais être le meilleur boulanger du monde, si je n'avais pas la bonne personne pour vendre et conseiller les clients cela ne pourrait pas marcher. C'est un projet que nous menons à deux, un véritable projet de vie.

Pourquoi avoir choisi Locon comme lieu d'implantation ? N'était-ce pas un peu risqué, l'ancien boulanger ayant fait faillite ?

Nous sommes originaires du Nord et souhaitions rester dans la région. A Locon, la boulangerie était fermée depuis plusieurs années. Nous nous sommes rapprochés de la Mairie pour en comprendre la raison. Il semble qu'avec l'ancien exploitant c'était compliqué… Nous avons ensuite contacté le nouveau propriétaire du bâtiment avec qui nous étions sur la même longueur d'onde. Lors du rachat du bâtiment, il avait promis à la mairie que cela resterait une boulangerie. Il était prêt à faire les travaux nécessaires pour relancer l'activité mais il voulait des gens sérieux en mesure de recréer une bonne boulangerie. Ce premier rendez-vous a eu lieu en avril 2016. Nous avons ouvert un an et demi après.

Quelles difficultés majeures avez-vous rencontrées lors du montage de votre projet ?

Nous n'avons pas eu de problème de financement, hormis les délais d'instruction de notre dossier par les banques qui ont pris beaucoup trop de temps. Mais ce n'est rien à côté des difficultés rencontrées par le propriétaire qui a dû remettre le bâtiment aux normes. Il lui a fallu batailler car il y a beaucoup de normes à respecter dans notre métier. L'administration demande énormément de documents et ça n'avance pas vite. On a perdu 5 ou 6 mois !

Quel a été le montant de votre investissement ?

Nous nous étions fixé un montant à ne pas dépasser d'environ 160 000 euros HT. J'ai pu apporter 25 000 euros grâce notamment à mon prix (20 000 euros) et j'ai emprunté 115 000 euros à la banque. La communauté d'agglomération de l'Artois m'a par ailleurs accordé une subvention de 18 000 euros et j'ai obtenu de la banque un crédit relais de 25 000 euros. Le matériel représente le plus gros des dépenses. C'est important de bien s'équiper en boulangerie. Nous avons acheté un four neuf car nous voulions un outil de bonne qualité et très fiable. Pour le reste, nous avons choisi du matériel d'occasion pour tenir notre budget. Nous avons également récupéré un peu de matériel appartenant à l'ancienne boulangerie. Nous avons fait de gros travaux d'agencement des locaux et avons choisi de placer le four dans le magasin. Les clients peuvent également voir le laboratoire et ainsi nous voir travailler. Ils aiment beaucoup ! L'atelier Pain & gâteaux

Avez-vous embauché des salariés ? Oui, nous avons recruté deux vendeuses à temps partiel pour assurer un roulement ainsi qu'une jeune pâtissière que j'ai formée car je suis pâtissier de formation. J'ai également 2 apprentis, un en boulangerie et un en pâtisserie. Quelle a été votre stratégie pour faire venir les clients ?

Ouvrir un beau magasin, avec un visuel attractif et des beaux produits de qualité. Nous avons réalisé un dépliant dans lequel nous insistons beaucoup sur le mode de cuisson en continu du pain. Quelle que soit l'heure de la journée, les clients achètent du pain frais !

Avez-vous innové dans les produits ?

Un des enseignements de notre étude de marché était que les gens ne voulaient plus forcément consommer du pain blanc. Pour eux le pain est devenu un aliment santé. Nous leur proposons donc des pains spéciaux avec différentes céréales ou graines, plus petits que ce qui se fait habituellement pour avoir une marge de manœuvre au niveau des prix. Nous avons également mis en avant la baguette de tradition française qui est la baguette préférée des Français. Cette baguette n'est pas forcément proposée dans les boulangeries du coin et c'est une de nos meilleures ventes ! Du côté de la pâtisserie, nous avions peur que les clients ne veuillent pas goûter des produits trop élaborés et cela a été tout le contraire. Ils ont tout de suite accroché ! Cela nous permet de laisser libre cours à notre imagination. Nous travaillons beaucoup sur les couleurs, les saveurs. Les couleurs attirent les clients. Les saveurs les font revenir. Nous faisons aussi attention au prix des matières premières pour ne pas vendre trop cher. Notre mille feuille a, par exemple, beaucoup de succès ! Il n'est pas proposé dans sa forme habituelle. Nous avons également revu la recette et il est délicieux !

Pourquoi avoir ouvert une page Facebook ?

C'est presque obligatoire dans une entreprise aujourd'hui. C'est un moyen de communication gratuit pour présenter les produits. On l'anime beaucoup afin de montrer que nous sommes actifs et que nous nous renouvelons sans cesse nos produits. Les clients nous suivent.

Après 6 mois d'activité quel est votre premier bilan ?

Nous avons eu énormément de monde à l'ouverture. Nous n'avions pas prévu autant d'affluence et avons eu un peu de mal à suivre en termes de production. Le concept novateur a attiré beaucoup de monde. Les gens ont besoin de nouveauté. La période des fêtes a également été une période de test. Ce fût une période de suractivité. On a peu dormi mais tout s'est très bien passé. Nous sommes désormais plus sereins et confiants en l'avenir.

Quels sont vos projets de développement ?

Nous avons la possibilité de rajouter un comptoir dans le magasin. La question est de savoir si nous développons une offre salée ou un rayon chocolat. Nous souhaitons bien réfléchir en amont car cela représente de nouveaux investissements et nous ne voulons pas nous tromper. Pour cela, nous allons interroger nos clients en leur soumettant un questionnaire pour cerner leurs attentes. Nous avions déjà procédé ainsi durant notre étude de marché.

Quels conseils donneriez-vous aux futurs entrepreneurs ?

Il faut bien mesurer son projet, bien le préparer pour se rapprocher le plus de la réalité. Au départ nous étions en sous-effectif car nous avions sous-évalué notre succès. L'étude de marché est accessible à tous. Il suffit de vouloir se bouger. Nous avons fait du porte à porte pendant trois semaines avec mon épouse. Cela nous a pris un peu de temps mais cela nous a aussi ouvert des portes. Dans le secteur de la boulangerie nous avons encore de beaux jours devant nous malgré la forte concurrence de la grande distribution. A nous de sortir du lot et de montrer notre savoir-faire ! Propos recueillis par Florence Pierre en mars 2018
Mars 2018