Pas-de-porte et droit au bail

Dans cet article :

Lorsqu'un créateur d'entreprise envisage d'occuper un local commercial, il peut être amené, suivant les circonstances, à verser :

- un pas-de-porte (également appelé droit d'entrée) au propriétaire des murs lors de la conclusion du bail, pour un local vacant. Il s'agit dans ce cas d'une clause du bail. Cette somme est définitivement acquise au propriétaire.
- un droit au bail au locataire sortant, en cas de reprise d'un bail existant. Il s'agit cette fois d'une clause du contrat de cession de bail.

Ces deux notions ne doivent donc pas être confondues : elles sont de nature juridique différente.

Le pas-de-porte

  • Détermination du montant du pas-de-porte

Le montant du pas-de-porte est librement fixé entre les parties. Il peut être considéré :

  • Soit comme un supplément de loyer (cas le plus fréquent) : le propriétaire souhaite se prémunir contre les hausses de loyer qui ne suivent pas la hausse de la valeur locative réelle des locaux. Dans ce cas, le montant du pas-de-porte est pris en compte pour le calcul du loyer du bail au moment de son renouvellement.
     
  • Soit comme une indemnité correspondant à la contrepartie pécuniaire, à la fois de la dépréciation de la valeur vénale des locaux et de la propriété commerciale acquise au locataire, consistant dans le droit au renouvellement de son bail. En effet, si le propriétaire souhaite reprendre les locaux, il devra verser au locataire une importante indemnité d'éviction.
     
  • Soit comme une indemnité correspondant à la "contrepartie pécuniaire d'éléments de natures diverses, notamment d'avantages commerciaux fournis par le bailleur sans rapport avec le loyer".

Il peut aussi être de nature mixte (supplément de loyer et indemnité).

Le propriétaire (appelé bailleur) et le locataire (appelé preneur) ont intérêt à préciser clairement dans le bail la qualification qu'ils entendent donner au pas-de-porte. A défaut, en cas de conflit, les juges recherchent la commune intention des parties, qui, le plus souvent le considèrent comme un supplément de loyer.

  • Conséquences fiscales de la qualification du pas-de-porte
  • Pas-de-porte considéré comme un supplément de loyer

- Pour le bailleur, le pas-de-porte est imposable (revenus fonciers, BIC ou IS) + assujettissement à la TVA si le loyer du bail y est lui-même assujetti.
- Pour le preneur, le pas-de-porte est une charge déductible des résultats, en pourcentage de la durée du contrat (1/9e par an).

  • Pas-de-porte considéré comme une indemnité

- Pour le bailleur, aucune imposition ne frappe l'indemnité.
- Pour le locataire, le pas-de-porte représente un élément incorporel non amortissable inscrit à l'actif du bilan.

Un arrêt du Conseil d’Etat du 15 février 2019 a permis de clarifier le régime fiscal applicable au droit d'entrée. Il considère en effet que le droit d'entrée doit être regardé comme une prestation accessoire partageant le même sort fiscal que le loyer et non pas une simple indemnité visant à dédommager le bailleur en cas de dépréciation de son bien.
Par conséquent, le droit d’entrée doit être soumis à la TVA au même titre que le loyer.

Le droit au bail

  • Sur le plan juridique

Le droit au bail est un élément du fonds de commerce appartenant au locataire sortant, qui est le droit d'occuper les locaux et de bénéficier d'un droit au renouvellement du bail qui y est associé ; il a donc une valeur patrimoniale.

L'entrepreneur signe un bail neuf ou achète un droit au bail ; dans ce cas, il reprend le bail conclu entre le précédent occupant et le propriétaire, pour la durée restant à courir.

Le locataire sortant cède par conséquent son bail moyennant le paiement d'une indemnité : le "droit au bail".

  • Sur le plan fiscal

Pour le locataire cédant, le montant de la vente du droit au bail est pris en compte pour la détermination du bénéfice imposable au titre des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).
Pour le nouveau locataire, le droit au bail est soumis aux droits d'enregistrement et il figure à l'actif du bilan en tant qu'immobilisation incorporelle non amortissable.

Il ne faut pas confondre la cession du contrat de bail, donnant lieu au versement d'un "droit au bail" et la cession du fonds de commerce dans son ensemble, le bail ne représentant qu'un des éléments de ce fonds.

Lorsqu'un exploitant cède son fonds à une personne reprenant la même activité et la même clientèle (notion de repreneur du fonds de commerce), le bailleur ne peut pas s'opposer à la vente. En revanche, une clause du bail peut interdire au locataire de céder le bail seul, indépendamment du fonds.

Le "bail à l'américaine"

Il s'agit d'un bail commercial sans pas-de-porte ni droit au bail.

Le locataire n'a pas à payer de somme initiale, mais il paie un loyer plus élevé au départ composé :

  • d'une part, du montant de la valeur locative des lieux,
  • d'autre part, de l'amortissement d'un droit d'entrée. Ce dernier est déterminé pour une somme globale en capital, payé de manière échelonnée sur toute la durée du bail, ce qui aboutit à un loyer supérieur au prix du marché.

Avantage de ce type de contrat : l'entreprise n'a pas de somme importante à verser au départ.

Inconvénient : les modalités de révision du loyer lors du renouvellement du bail à l'américaine n'ont pas été clairement tranchées par les tribunaux, ce qui peut être pénalisant pour le locataire.
D'autre part, en cas de cession de son bail, le locataire ne peut pas récupérer un "droit au bail" auprès de son successeur.

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