Protection sociale des travailleurs indépendants
Dans cet article :
Les commerçants, artisans et professionnels libéraux bénéficient d'une protection sociale spécifique et obligatoire qui offre les mêmes types de garanties que le régime général des salariés.
L'affiliation au régime général de la sécurité sociale (ex Sécurité sociale des indépendants)
Pour rappel, le régime social des indépendants (RSI) a été supprimé le 1er janvier 2018, ses missions ont été progressivement intégrées au sein du régime général de la sécurité sociale sur une période transitoire de 2 ans. A cette date, la caisse nationale du RSI a pris le nom de caisse nationale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants (SSI) et les caisses locales ont pris le nom de caisses régionales déléguées pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants.
Depuis le 1er janvier 2020, tous les travailleurs indépendants relèvent du régime général de la sécurité sociale et pour leur protection sociale de :
- l'assurance maladie et les CPAM ;
- l'assurance retraite et les Carsat ou la CNAV Ile-de-France ;
- des Urssaf.
- La fin des missions des organismes conventionnés
Depuis le 1er janvier 2019, les nouveaux travailleurs indépendants sont automatiquement rattachés et pris en charge par la CPAM et non plus par les organismes conventionnés. Ce changement n'a pas modifié la couverture santé des travailleurs indépendants.
Par ailleurs, depuis le 1er janvier 2020, tous les indépendants ont été automatiquement intégrés au régime général sans démarche ni formalité à effectuer. La prise en charge des frais de santé sera assurée par la caisse d’assurance maladie du lieu de résidence du travailleur indépendant, dont le rattachement effectif a été effectué entre le 20 janvier et le 17 février 2020.
- La radiation des registres légaux en cas de non déclaration de chiffre d'affaires
Un décret du 23 octobre 2019 a modifié la procédure de radiation de l'ex SSI des travailleurs indépendants. Qu’il soit entrepreneur individuel ou non, le travailleur indépendant qui n'a pas réalisé de chiffre d'affaires ou de recettes ou qui n'a pas déclaré de chiffre d'affaires ou de revenus durant au moins deux années civiles consécutives est radié de son affiliation à la sécurité sociale.
Il dispose d'un mois pour s'opposer à cette radiation. Par ailleurs, la radiation de l'ancienne SSI entraîne une radiation d'office des registres et répertoires légaux (Sirene, RCS, répertoire des métiers...).
- Cas des travailleurs indépendants détachés
La mise en oeuvre du Brexit avec ou sans accord de retrait a des conséquences sur le régime social des travailleurs indépendants "détachés" qui exercent habituellement leur activité en France et qui sont amenés à exercer temporairement leur activité au Royaume-Uni. Dans l'attente d'avoir un accord sur le sort du Brexit, l'Urssaf précise à travers divers documents les conséquences sociales du Brexit notamment en ce qui concerne le travailleur indépendants détaché.
L'Urssaf met en place un nouveau service pour les artisans, commerçants et professionnels libéraux exerçant tout ou partie de leur activité à l’étranger afin qu'il puissent continuer à payer leurs cotisations et bénéficier d'une protection sociale française.
Les prestations maladie-maternité
- Remboursement maladie
Les taux de remboursement des dépenses de soins par la Sécurité sociale pour les indépendants sont identiques à ceux du régime général des salariés.
- Indemnités journalières
Pour les artisans et les commerçants et les professionnels libéraux, la CPAM verse, après un an d'affiliation, des indemnités journalières en cas d'arrêt de travail pour cause de maladie ou d'accident.
Pour la détermination du délai d'un an, la période d'affiliation à un régime antérieur au titre de l'exercice d'une activité professionnelle est prise en compte à condition qu'il n'y ait pas d'interruption entre les 2 affiliations.
La première année d'activité, le revenu annuel moyen correspond au revenu connu entre le début d'activité et le constat de l'arrêt de travail, reconstitué sur une année entière.
Aucune indemnité journalière ne peut être versée si le revenu de l'assuré est inférieur à 10 % de la moyenne du Pass en vigueur au cours des 3 années civiles précédant la date de versement des prestations.
La loi de financement de la sécurité sociale 2022 rajoute un nouveau cas de maintien de droits à indemnités journalières maladie et maternité en cas de reprise d'activité. Désormais, les travailleurs indépendants ayant ouvert des droits au titre d'une nouvelle activité professionnelle indépendante, mais dont le montant des IJ est nul, conserveront leurs droits aux IJ au titre de leur situation antérieure. Ces nouvelles règles s'appliquent rétroactivement aux arrêts de travail ayant débuté à compter du 1er janvier 2020 et pour les travailleuses indépendantes ayant commencé leur activité avant le 1er janvier 2019, aux IJ maternité ayant été versées à compter du 1er novembre 2019.
Délai de carence
L'indemnité est versée :
- à partir du 4ème jour en cas de maladie, d'accident ou d'hospitalisation,
Durée du versement
Les indemnités journalières peuvent être versées pendant :
- 3 ans, pour les arrêts de travail prescrits au titre d'une affection de longue durée (ALD) ou au titre de soins de longue durée,
- 360 jours, sur une période de 3 ans, pour les autres arrêts (maladie, accident).
- Allocations maternité
Les femmes travailleurs indépendantes ou conjointes collaboratrices peuvent bénéficier :
- d'une allocation forfaitaire de repos maternel destinée à compenser partiellement la diminution de leur activité.
Cette allocation est égale au plafond mensuel de la sécurité sociale (3 428 € en 2022) versée en 2 fois : une moitié à la fin du 7ème mois de grossesse et l'autre moitié après l'accouchement.
- d'une indemnité journalière forfaitaire d'interruption d'activité.
Elle est versée uniquement en cas de cessation de toute activité professionnelle pendant au moins 44 jours consécutifs dont 14 jours avant la date présumée d'accouchement.
A noter : l'entrepreneure n'est pas obligée de se faire remplacer pour bénéficier de cette prestation.
Les prestations versées en cas de maternité sont réduites à 10 % de leur valeur si le revenu de l'assurée est inférieur à 3 428 € en 2022.
Depuis le 1er janvier 2018, il faut être affilié à ce régime depuis au moins 10 mois.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 aligne les conditions d'indemnisation du congé de maternité des non-salariées sur celles applicables aux salariées pour la durée minimale de cessation totale d'activité, qui est fixée à 8 semaines. Cette condition est applicable pour le bénéfice des indemnités journalières et de l'allocation forfaitaire de repos maternel versée jusqu'alors sans condition d'arrêt d'activité. Cette mesure s'applique aux allocations dont le premier versement intervient à compter du 1er janvier 2019. Par ailleurs, la durée maximale de versement des indemnités journalières est alignée sur celle du régime général soit 112 jours. Depuis le 1er janvier 2019, il est possible de reporter le paiement des cotisations sociales dues pendant le congé maternité ou d'adoption sur une durée maximale de 12 mois sans majoration ni pénalité de retard. Ce nouveau dispositif n'est pas applicable aux assurées relevant du régime micro-social. Pour les assurées relevant des professions libérales, il entrera en vigueur à compter du 1er janvier 2020.
- La complémentaire santé solidaire
En cas de revenus très faibles, les travailleurs indépendants ont accès à la complémentaire santé solidaire.
La Complémentaire santé solidaire est une aide pour payer les dépenses de santé si les ressources du foyer sont modestes. Selon les ressources, elle ne coûte rien ou coûte moins d’un euro par jour et par personne. Le droit à la Complémentaire santé solidaire dépend donc de la situation et des ressources.
Simulateur : évaluez vos droits à la complémentaire santé solidaire
- Prévoyance (invalidité, décès)
A la différence des salariés, la prévoyance des indépendants n'est pas directement liée à leur couverture maladie. Les garanties proposées varient d'un régime à l'autre et sont, dans la plupart des cas, insuffisantes pour compenser les pertes de revenu suite à un accident, une maladie ou encore un décès.
Ainsi, les travailleurs non-salariés peuvent souscrire un contrat de prévoyance (loi Madelin) afin de bénéficier d'une meilleure couverture et percevoir :
- une rente en cas d'invalidité ou de dépendance,
- le versement d'un capital ou d'une rente en cas de décès.
La prévoyance des commerçants et artisans est gérée par la Sécurité sociale pour les indépendants, selon des règles spécifiques (durée d'affiliation minimum, calcul des prestations…).
Dans ce cadre, ils peuvent bénéficier d'une pension :
- égale à 50 % du revenu annuel moyen cotisé sur les 10 dernières années en cas d'incapacité totale d'exercice et jusqu'à l'âge légal de départ à la retraite,
- égale à 30 % du revenu annuel moyen cotisé sur les 10 dernières années, en cas d'incapacité partielle.
En cas de décès de l'assuré, ses ayant-droits peuvent percevoir un capital.
La prévoyance des professions libérales n'est pas uniforme : chaque section professionnelle de la CNAVPL propose un régime spécifique.
Depuis le 1er juillet 2021, les professions libérales peuvent percevoir des indemnités journalières avec un délai de carence de 3 jours, pendant 90 jours.
En cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle, ils bénéficient :
- du remboursement de leurs frais médicaux en partie par la Sécurité sociale pour les indépendants (et en partie par leur mutuelle, s'ils en ont contracté une),
- et, pour les artisans et commerçants, d'indemnités journalières, après un délai de carence de 3 jours et pendant une durée limitée.
Toutefois, ils ne percevront aucune indemnité ou rente en cas d'incapacité permanente !
Il est donc recommandé de souscrire une assurance volontaire "accident de travail et maladie professionnelle" auprès de la CPAM du lieu de domicile et/ou de contracter une assurance privée.
- Congé paternité
En tant que chef d'entreprise ou conjoint collaborateur, il est possible de bénéficier d'une indemnité à l'occasion de la naissance ou de l'adoption d'un enfant.
L'assuré doit interrompre son activité professionnelle et faire une demande à son organisme conventionné.
L'indemnité journalière est d'un montant maximum de 56,35 € par jour.
Elle peut être versée pendant :
- 25 jours consécutifs au maximum en cas de naissance ou d'adoption simple,
- ou 32 jours consécutifs au maximum en cas de naissances ou d'adoptions multiples.
Le congé paternité de l’artisan-commerçant ou micro-entrepreneur se décompose en deux périodes : - une première période obligatoire de 7 jours (3 jours de congé de naissance et 4 jours de congé paternité), qui doit débuter le jour de la naissance de l’enfant ; - une seconde période de 18 jours en cas de naissance simple ou de 25 jours en cas de naissances multiples. Cette seconde période de congé est facultative et peut être fractionnée en trois parties dont la plus courte est au moins égale à 5 jours. Elle doit débuter dans un délai de 6 mois à compter de la naissance de l’enfant (report possible au-delà de 6 mois en cas d’hospitalisation, de décès de l’enfant ou de la mère).
Le versement des prestations paternité est réduit à 10 % de ces montants si le chef d'entreprise perçoit un revenu inférieur à 3 428 € en 2022.
Le congé doit débuter dans les 4 mois suivant la naissance ou l'adoption de l'enfant.
Les allocations familiales
Les travailleurs indépendants bénéficient des mêmes droits que les salariés en matière de prestations familiales versées par les Caisses d'allocations familiales (Caf).
La retraite
- Commerçants et artisans
Le régime de retraite de base des commerçants et artisans est aligné sur celui des salariés.
Depuis le 01/01/2015, le versement de la pension de retraite est subordonné à la cessation de l'ensemble des activités professionnelles et plus seulement à la cessation de l'activité indépendante.
L'âge minimal de liquidation de la retraite de base est le même que celui du régime général.
Comme pour le régime général des salariés, le montant de la retraite est fonction :
- du revenu annuel moyen du travailleur indépendant,
- du taux de retraite et de la durée d'assurance tous régimes confondus.
La retraite de base est calculée selon la formule suivante :
Revenu annuel moyen × Taux × (Nombre de trimestres d'assurance artisan ou commerçant / Durée de référence)
En cas de décès de l'assuré, le conjoint survivant peut percevoir une pension de réversion.
Depuis 2013, les commerçants et les artisans bénéficient du même régime de retraite complémentaire obligatoire géré par la Sécurité sociale pour les indépendants.
La retraite complémentaire garantit une retraite équivalente à la retraite complémentaire des salariés non cadres.
Les prestations sont exprimées en points, le montant annuel de la pension étant obtenu en multipliant le nombre de points par la valeur du point.
Les différences entre travailleurs salariés et non-salariés portent sur les taux de cotisation et la rémunération sur laquelle s'appliquent ces taux.
- Professionnels libéraux
Les professions libérales sont obligatoirement affiliées à un régime de base qui relève de la CNAVPL. L'âge minimal requis pour faire liquider la retraite de base est le même que celui du régime général.
La pension de retraite dépend du nombre de points acquis et de la durée d'assurance.
En cas de décès de l'assuré, le conjoint survivant a droit à une pension de réversion.
Leur retraite complémentaire, également obligatoire, dépend en revanche de leur profession.
Il existe ainsi 10 régimes complémentaires professionnels totalement autonomes (notaires, médecins, dentistes, agents d'assurance, etc.).
Certaines professions de santé disposent également d'un régime supplémentaire de retraite.
Comme pour la santé et la prévoyance, les cotisations relatives à un contrat privé d'épargne retraite (loi Madelin) sont en partie déductibles fiscalement.
Les professionnels libéraux affiliés à la Cipav
La loi de financement de la sécurité sociale 2018 a impacté le périmètre des professions libérales relevant de la Cipav. L'article 15 de cette loi a permis le transfert de la quasi-totalité des professions affiliées à la Cipav au régime général et instaure une liste limitative des professions relevant de la Cipav.
Seule une vingtaine de professions contre près de 400 avant la loi, demeurent à la Cipav :
- architecte, architecte d’intérieur, économiste de la construction, maître d’œuvre, géomètre expert ;
- ingénieur conseil ;
- moniteur de ski, guide de haute montagne, accompagnateur de moyenne montagne ;
- ostéopathe, psychologue, psychothérapeute, ergothérapeute, diététicien, chiropracteur ;
- artiste non affilié à la maison des artistes ;
- expert en automobile, expert devant les tribunaux ;
- conférencier.
Les indépendants qui créent une activité ne relevant pas de la liste des professions mentionnées par la loi sont affiliés à la branche des indépendants du régime général :
- à compter du 1er janvier 2018, pour les micro-entrepreneurs,
- à compter du 1er janvier 2019, pour les professionnels libéraux classiques.
Les adhérents à la Cipav ayant créé une activité avant le 1er janvier 2019 mais dont la profession ne fait plus partie du périmètre de la Cipav disposent d’un droit d'option durant cinq ans afin de rejoindre la branche des indépendants du régime général. Le décret n°102 du 2 mai 2019 précise les règles de conversion des points Cipav en points du régime complémentaire des indépendants.
Selon le décret du 2 mai 2019, les professionnels libéraux qui relèvent de la SSI pour leur retraite, soit obligatoirement, soit sur option, peuvent ainsi demander que leur cotisation soit calculée à un taux :
- nul pour la fraction du revenu inférieure ou égale au Pass, ce qui correspond en pratique à une exonération de cotisation ;
- de 14 % sur la seule part du revenu annuel d’activité indépendante compris entre le plafond annuel de la sécurité sociale (Pass) et 4 fois ce plafond.
Ces dispositions sont applicables aux cotisations dues au titre des périodes courant depuis le 1er janvier 2019.
Le chômage
La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a ouvert le droit aux indemnités d’allocation chômage aux travailleurs indépendants.
Cette mesure est en vigueur depuis le 1er novembre 2019.
L'allocation chômage des travailleurs indépendants (ATI) assure un revenu de remplacement versé par Pôle emploi aux indépendants contraints de mettre fin à leur activité en raison d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire, au même titre que les salariés privés de leur emploi.
Ainsi, les travailleurs indépendants dont l’activité a cessé peuvent bénéficier de l’allocation des travailleurs indépendants (ATI) de 800 € par mois pendant 6 mois, sous réserve de respecter les conditions suivantes :
- avoir exercé leur activité non salariée pendant 2 ans en continu,
- avoir cessé leur activité pour cause de liquidation ou de redressement judiciaire, être à la recherche effective d'un emploi ;
- justifier au minimum de 10 000 € de revenus perçus au titre de cette activité et disposer de ressources inférieures au montant du revenu de solidarité active (RSA).
L'accès à l'ATI est désormais ouvert aux travailleurs indépendants dont l'entreprise a fait l'objet d'une déclaration de cessation totale et définitive d'activité auprès soit du centre de formalités des entreprises compétent jusqu'au 31 décembre 2022, soit au guichet unique à partir du 1er janvier 2023, lorsque cette activité n'est pas économiquement viable (baisse d'au moins 30 % des revenus déclarés du travailleur indépendant ou du résultat de la société, attestée par un tiers de confiance). La condition de revenu est également assouplie puisque le travailleur indépendant doit justifier, au titre de son activité non salariée, de revenus antérieurs d’activité égaux ou supérieurs à 10 000 € désormais calculés sur l’une des deux dernières années d’activité (et non plus comme avant à 10 000 € par an les 2 années précédentes). Ces dispositions sont applicables à partir du 1er avril 2022 pour les demandes déposées à compter de cette date.
Au-delà de ces conditions spécifiques, les indépendants qui souhaitent bénéficier de l’ATI doivent en plus répondre aux mêmes conditions que ceux qui prétendent à l’ARE, à savoir :
- être apte physiquement à l’exercice d’un emploi ;
- résider sur le territoire national français ;
- ne pas bénéficier d’une retraite à taux plein.