Dans cet article :
L’état de cessation de paiements est une étape critique dans la vie d’une entreprise, marquant son incapacité à honorer ses dettes arrivées à échéance avec ses ressources disponibles. Quelles sont les entreprises concernées ? Quelle est la définition précise de cette situation ? Quelles démarches effectuer ? Dans cet article, nous faisons le point sur la cessation des paiements : de sa définition aux procédures à respecter, en passant par les conséquences juridiques et les solutions pour y remédier.
Qu'est-ce que la cessation des paiements ?
L'état de cessation des paiements est constitué lorsque l'actif disponible d'une entreprise ne permet plus de faire face au passif exigible.
Cette condition s'apprécie pour le seul patrimoine engagé par l'activité professionnelle.
Le débiteur qui établit que les réserves de crédits ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, n'est pas considéré comme étant en état de cessation des paiements.
L'actif disponible
Il est constitué de toutes les sommes ou effets de commerce (traites, lettres de change, etc.), dont peut disposer immédiatement ou à très court terme une entreprise.
Ex. : liquidités de caisse et de banque, lettres de changes escomptables, etc.
Le passif exigible
Il est constitué des dettes arrivées à échéance, non réglées et dont les créanciers peuvent exiger le paiement immédiatement. Il faut en outre que ces dettes soient :
- certaines, c'est-à-dire non litigieuses, non contestées dans leur principe, leur montant ou leur mode de paiement ;
- liquides, c'est-à-dire dont le montant est déterminé ;
- exigibles, c'est-à-dire qu'elles n'ont pas donné lieu à un moratoire ou à un délai de paiement de la part du créancier.
Quelle est la différence entre cessation des paiements et difficultés passagères ?
La cessation de paiement est un élément clé des procédures collectives. Le redressement ou la liquidation d’une entreprise ne peuvent pas être prononcés si l’entreprise n’est pas en cessation de paiement. Or, une entreprise en cessation des paiements a accès à la procédure de redressement judiciaire donc potentiellement elle peut encore se redresser contrairement à un état de difficulté passagère où il est alors possible de mettre en place des solutions temporaires pour redresser l’état financier de la société sans avoir accès à la procédure de redressement judiciaire.
Par exemple, une entreprise peut être en difficulté lorsqu’elle est dans l’attente d’un règlement d’un débiteur. Alors qu’une entreprise qui n’arrive plus à honorer ses dettes sera considérée en cessation des paiements.
Le terme "dépôt de bilan" est l'ancien terme utilisé pour désigner la déclaration de cessation des paiements.
Quelles sont les personnes concernées par la cessation des paiements ?
Les entités pouvant faire l'objet d'une cessation des paiements
- les sociétés (SARL, SAS, SA, SCI, EURL, SASU, etc.) ;
- les agriculteurs ;
- les professions libérales ;
- les entrepreneurs individuels (de type classique ou micro-entrepreneur) ;
- les associations.
Les personnes ou entités non concernées par la cessation des paiements
- les personnes physiques domiciliées en Alsace ou en Moselle ;
- les particuliers qui font l'objet d'une procédure de surendettement ;
- les personnes visées par l'extension d'une procédure collective déjà ouverte à l'encontre d'une société.
Qui peut déclarer la cessation des paiements ?
La déclaration d'état de cessation des paiements doit être réalisée par le chef d'entreprise ou le dirigeant de la société concernée via le formulaire cerfa 10530.
Comment déclarer une cessation des paiements ?
Pour bénéficier d'une procédure de cessation des paiements, il est nécessaire de remplir un formulaire spécifique dont l'objectif est de prouver l'existence de la cessation des paiements pour in fine obtenir l'ouverture de redressement ou liquidation judiciaire.
Vous pouvez télécharger le cerfa n°10530*01, remplir et parapher l'ensemble des pages, le dater et le signer.
Le dépôt : envoi du formulaire peut aussi être effectué via le tribunal digital à l'adresse suivante : https://www.tribunaldigital.fr/
Quand faut-il faire la déclaration de cessation des paiements ?
La déclaration doit être déposée au greffe du tribunal compétent au plus tard le 45e jour suivant la date de cessation des paiements.
Auprès de qui faut-il déposer la déclaration de cessation des paiements ?
La déclaration d'état de cessation des paiements doit être déposée auprès :
- du greffe du tribunal de commerce dès lors qu'il s'agit d'une entreprise dont l'activité est de nature commerciale ou artisanale ;
- du greffe du tribunal judiciaire dans les autres cas (activité libérale ou agricole).
Concernant les entreprises individuelles, le tribunal compétent est celui du ressort duquel est situé l’établissement principal. En l’absence d’établissement fixe et à défaut de domicile ou de résidence, la juridiction compétente est celle dans le ressort de laquelle est située la commune de rattachement.
Concernant les personnes morales, le tribunal compétent est celui du lieu du siège social de la société à condition qu’il ne soit pas fictif.
En cas de besoin, voici une liste de contacts en cas de cessation des paiements.
Quels sont les documents à fournir au moment d'une déclaration de cessation des paiements ?
Le formulaire de déclaration de cessation des paiements doit être accompagné des éléments suivants :
En un exemplaire :
- la copie d’une pièce d’identité du représentant légal ou du commerçant ;
- le numéro unique d’identification délivré par l’INSEE ;
- un état des nantissements et privilèges (état d’endettement complet datant du jour du dépôt) ;
- les comptes annuels du dernier exercice ;
- une situation de trésorerie de moins d’un mois.
En trois exemplaires :
- le prévisionnel de trésorerie et d’exploitation pour 6 mois en cas de demande de redressement judiciaire (à faire valider si possible par l’expert-comptable de l’entreprise).
Comment se passe l'instruction d'une cessation des paiements ?
Le tribunal saisi doit procéder à une comparaison entre l’actif disponible et le passif exigible pour déterminer si la société est en cessation des paiements ou non.
En pratique, le tribunal va examiner la situation de l’entreprise ou de la société. Une fois cela ait, il va rendre un jugement constatant l’état de cessation des paiements ou, au contraire, son absence. Si le tribunal approuve la demande, il va fixer une date de cessation des paiements (le plus souvent antérieure à la date de saisine du tribunal) et prononcer l’ouverture d’une procédure collective (redressement ou liquidation judiciaire) ou, le cas échéant, d’une procédure de conciliation.
Le tribunal rend sa décision en convoquant le débiteur ainsi que le représentant des salariés de l'entreprise au plus tard le 15e jour suivant la date de cessation effective.
Quelles sont les conséquences de la déclaration de cessation des paiements ?
- impossibilité de bénéficier d’une procédure de sauvegarde ;
- ouverture d’une procédure de redressement, de liquidation ou de conciliation ;
- démarrage de la période suspecte.
Pour comprendre la notion de période suspecte, il est nécessaire de souligner que le tribunal fixe la plupart du temps une date de cessation des paiements effective antérieure à la date du jour de la saisine de la juridiction.
La « période suspecte » est la période qui s’est écoulée entre la date de cessation fixée par le tribunal et le jugement d’ouverture de la procédure collective.
Les actes accomplis pendant cette période peuvent être annulés ou déclarés nuls de plein droit.
Un dirigeant peut-il être sanctionné en cas de dépôt tardif d'une déclaration de cessation des paiements ?
Le dépôt tardif d’une déclaration de cessation des paiements peut engager la responsabilité du chef d’entreprise et constitue sur le plan jurisprudentiel une faute de gestion (Cass. Com., 17 juin 2020 n°18-11737).
De même, un entrepreneur individuel ou un dirigeant de société peut être frappé de faillite personnelle ou d'une interdiction de gérer s'il a omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de 45 jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir, par ailleurs, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation (L653-8 du Code de commerce).
Que se passe-t-il une fois que le tribunal a déclaré la cessation des paiements ?
L’objectif est de déterminer si l’entreprise peut être sauvée ou si elle doit cesser définitivement ses activités. La décision du tribunal peut aboutir à deux issues principales : le redressement ou la liquidation judiciaire.
1. Le redressement judiciaire est prononcé lorsque le tribunal estime que l’entreprise dispose encore d’une chance de surmonter ses difficultés financières et de poursuivre son activité. Cette procédure vise à maintenir l’activité de l’entreprise autant que possible, sauvegarder les emplois, assurer le paiement des créanciers selon un plan de redressement.
2. La liquidation judiciaire quant à elle est décidée lorsque l’entreprise est jugée dans l’impossibilité totale de redresser sa situation. Dans ce cas, l’objectif est de cesser définitivement l’activité de l’entreprise et de vendre ses actifs pour rembourser les créanciers dans la mesure du possible.
En savoir plus sur les procédures collectives.
Combien coûte une procédure de cessation des paiements ?
Le coût global de cette procédure dépend de la nature de chaque situation.
Textes de référence
Articles L631-1 et s. L640-4 et s. du code de commerce