Dans cet article :
Entreprendre dans l’Economie sociale et solidaire (ESS) implique d’adhérer à une certaine idée de l’entreprise, soucieuse de l’intérêt général et de son utilité sociale. Mais par delà la question des valeurs, l’entreprise ESS se définit par des structures juridiques bien précises.
Les grands principes de l'ESS
L’Economie sociale et solidaire (ESS) emploie plus de 10 % des salariés en France. Elle intéresse de plus en plus d’étudiants, d’entrepreneurs et de consommateurs. Pourtant, il reste difficile de cerner précisément ses contours. La loi en définit les grands principes :
- lucrativité limitée : les bénéfices sont majoritairement dédiés au maintien ou au développement de l’activité.
- but autre que le partage de bénéfices : social, environnemental, épanouissement, sport…
- gouvernance démocratique : les membres, les salariés, les associés, les parties prenantes pèsent sur les décisions.
Ces principes trouvent une traduction concrète dans une grande variété de structures ou règles juridiques vieilles de plus d’un siècle (associations) ou imaginées il y a quelques années à peine (agrément Esus). Si vous souhaitez entreprendre dans l’ESS, il y a nécessairement une formule qui convient à votre projet !
Les classiques
Certaines structures sont incorporées à la grande famille de l’ESS par nature, c’est-à-dire par leur statut juridique.
- Les coopératives : le terme de "coopérative" couvre un large panel de structures qui ont pour point commun la propriété collective de leurs moyens et l’exercice démocratique du pouvoir. La coopérative peut rassembler des personnes physiques et morales autour d’un projet économique, social ou culturel. Il existe des coopératives :
- d'entrepreneurs (agricoles, artisans, transports, commerçants, etc.),
- d'usagers (banques, consommateurs, etc.),
- de salariés (Scop, Scic).
Des règles spécifiques régissent chaque famille de coopératives. Par exemple, la Scop se distingue par quelques règles bien précises concernant la distribution des bénéfices, affectés majoritairement aux réserves et aux salariés via l’intéressement, ainsi que par sa gouvernance. Dans une Scop, les salariés sont toujours associés et majoritaires et élisent leur dirigeant.
À noter que la finalité de l’activité n’entre pas en ligne de compte.
- Les associations : régie par la loi de 1901, l’association rassemble plusieurs personnes qui souhaitent ensemble réaliser un projet, défendre une cause ou partager une activité.
Ses principaux avantages : la simplicité, aussi bien dans les démarches de création que dans le fonctionnement quotidien et l’exonération d’impôts commerciaux, tant que l’activité demeure non lucrative.
En revanche, la seule façon de gagner sa vie dans une association est d’en être salarié : aucune distribution de bénéfices n’est possible, ni rémunération des dirigeants, sauf exception marginale.
À noter toutefois : une association qui prendrait de l’ampleur a la possibilité de se transformer en société coopérative (Scop) ou en groupement d’intérêt économique (GIE).
- Les mutuelles : elles se créent sur la base d'une solidarité professionnelle ou territoriale et ont comme objectif une couverture des risques (santé, assurance) partagée équitablement par tous les sociétaires, sans but lucratif. On y trouve quelques mastodontes de la protection sociale et de l’Assurance : MAIF, Macif, MGEN, MMA, etc.
- Les fondations : la fondation rassemble des moyens financiers, au service d’une cause d’intérêt général, sans but lucratif. Sa création est beaucoup plus contraignante que celle d’une association (mise de fonds minimum, autorisation et contrôle des pouvoirs publics), mais le ou les fondateurs en gardent de contrôle.
Les sociétés commerciales de l’ESS
Des sociétés commerciales répondant à certaines conditions peuvent également entrer dans le domaine de l’ESS, ou même aller plus loin en obtenant un agrément "entreprise solidaire d'utilité sociale" (ESUS).
- Société commerciale de l’ESS : des sociétés commerciales classiques (SARL, SAS, SA) peuvent entrer de plein droit dans le champ de l’ESS, depuis le décret N°2015-858 du 13 juillet 2015, en décidant d’intégrer un certain nombre d’engagements et de règles de fonctionnement à leurs statuts :
- l’objet social doit mentionner des objectifs en accord avec les valeurs de l’ESS : soutien au personnes fragiles, lutte contre les inégalités et l’exclusion, préservation de la cohésion sociale, etc.
- la gouvernance doit intégrer des principes démocratiques,
- la répartition des bénéfices doit être encadrée.
En faisant partie officiellement de la famille de l’ESS, ces sociétés affichent leurs principes éthiques et peuvent également bénéficier de certains financements réservés aux acteurs de l’ESS.
- Les entreprises solidaires d’utilité sociale (Esus) : les sociétés commerciales de l’ESS peuvent franchir un palier supplémentaire en demandant un agrément Esus auprès de la Direccte (Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi).
Cet agrément nécessite l’ajout, dans les statuts, d’une mention concernant la politique salariale. Deux conditions doivent être respectées :
- la moyenne des rémunérations versées aux 5 salariés ou dirigeants les mieux rémunérés ne doit pas excéder un plafond annuel fixé à 7 fois le Smic ou le salaire minimum de branche
- la rémunération versée au salarié le mieux rémunéré ne doit pas excéder un plafond annuel fixé à 10 fois le Smic ou le salaire minimum de branche.
Par ailleurs, la demande d’agrément, composée d’un dossier d’une quinzaine de pages, nécessite de démontrer, chiffres à l’appui, l’impact social de l’entreprise, et la part qu’occupent ses activités à vocation solidaire dans ses comptes de résultat.
Cet agrément donne accès à certains financements, notamment issus de la manne de l’épargne salariale solidaire, ainsi qu’à des accompagnements spécifiques (DLA) et des avantages fiscaux pour les investisseurs.
Les organismes d’insertion
Les entreprises et organismes d’insertion bénéficient de plein droit de l'agrément Esus et de ses avantages.
- Entreprises adaptées et Esat : les entreprises adaptées (AE) et les services d'aide par le travail (Esat) ont pour mission d'intégrer durablement les travailleurs handicapés dans l'emploi. Les entreprises adaptées (anciennement Ateliers protégés) emploient au minimum 80% de salariés handicapés dans des conditions de travail adaptées à leur handicap.
- Les structures d'insertion par l'activité économique (SIAE) : elles existent sous différentes formes, entreprises d’insertion, associations intermédiaires, entreprises de travail temporaire d'insertion (Etti), chantiers d'insertion, groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification (GEIQ), régies de quartier, ateliers de centres d'hébergement (CHRS). Elles contribuent à l'insertion sociale et professionnelle de personnes exclues du marché de l'emploi.